NoirEs sous surveillance. Esclavage, répression et violence d'État au Canada (French Edition) by Robyn Maynard

NoirEs sous surveillance. Esclavage, répression et violence d'État au Canada (French Edition) by Robyn Maynard

Auteur:Robyn Maynard
La langue: fra
Format: azw3
Éditeur: Mémoire d'encrier
Publié: 2018-10-03T04:00:00+00:00


la détention d’immigration : une captivité arbitraire à durée indéterminée

La « criminalisation des migrants de couleur » n’est pas un concept théorique : pour les hommes et les femmes détenus en vertu de la législation sur l’immigration, elle se traduit par une incarcération à part entière – avec détention solitaire, combinaison orange et fouilles corporelles37. La répression étatique que vivent les migrants pauvres racisés placés en détention d’immigration est à bien des égards identique à celle de l’emprisonnement de droit commun – mais en plus arbitraire et moins réglementé. Cette détention de non-citoyens présente aussi des parallèles évidents avec l’incarcération massive de Noir.e.s et d’Autochtones dans les établissements provinciaux et fédéraux. Cependant, contrairement à la prison de droit commun, la détention d’immigration n’est pas officiellement considérée comme une punition, mais comme une mesure strictement administrative. Les migrants détenus ne purgent pas de peine et ne sont d’ailleurs accusés d’aucun crime. Ils sont incarcérés parce qu’ils ne disposent pas de certains documents d’identité exigés, qu’ils sont réputés représenter un risque pour la sécurité publique ou que l’État craint qu’ils ne prennent la fuite. Que ce soit parce que son visa de tourisme ou de travail est périmé, que sa demande de statut de réfugié a été refusée, qu’il ou elle a été contraint d’arriver au Canada par des moyens « irréguliers » (par exemple, par bateau ou avec un passeur) ou pour toute autre raison, quiconque ne possède pas les justificatifs voulus peut être détenu en vertu de la réglementation sur l’immigration38. Ce type de détention n’est pas rare au Canada : de 2006 à 2014, près de 90000 migrants ont ainsi été jetés derrière les barreaux sans accusation39. Chaque année, 11000 migrants en moyenne, dont de nombreuses personnes racisées, sont détenus au Canada en vertu de la réglementation sur l’immigration; parmi elles, plus de 800 sont des enfants40.

L’opinion publique s’imagine fréquemment que la détention d’immigration ne touche que les migrants dangereux. En réalité, moins de 5% de ces détenus sont considérés comme pouvant représenter une « menace pour la sécurité41 »; la plupart sont simplement des demandeurs du statut de réfugié dont le dossier a été rejeté et que l’État soupçonne de pouvoir prendre la fuite. Or, cette désignation est lourde de conséquences, elle permet d’enfermer des migrants s’ils sont présumés susceptibles de ne pas se présenter aux autorités le jour prévu de leur expulsion. Elle place aussi les demandeurs du statut de réfugié dans une situation impossible. Dans le cadre de ses démarches, le demandeur doit en effet démontrer qu’il craint sincèrement de retourner dans le pays dont il est originaire; mais s’il exprime une peur réelle et légitime et que sa demande est rejetée, il est souvent placé en détention « préventive » pour l’empêcher de s’enfuir, même si son expulsion n’est pas imminente42. Autrement dit, il est puni d’incarcération pour avoir commis le « crime » de dévoiler son traumatisme.

Certaines détentions relatives à l’immigration s’expliquent par des modifications apportées à la Loi sur l’immigration et la protection



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