Mémoires impubliables by Péan Pierre

Mémoires impubliables by Péan Pierre

Auteur:Péan Pierre
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Albin Michel
Publié: 2020-02-11T12:45:10+00:00


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Il faut sauver les cinq enfants d’Agathe !

* * *

Mercredi 6 avril 1994. À 23 heures 30, Dominique Pin, l’adjoint de Bruno Delaye, me prévient que l’avion transportant les présidents du Rwanda et du Burundi a été descendu par un missile. J’essaie immédiatement d’obtenir ma fille Raphaële au Burundi. Je n’ai que son compagnon après une trentaine de sonneries. La nouvelle est annoncée à RFI. Je la confirme à Bujumbura.

Je n’obtiens Raphaële que dans la journée du lendemain. Sa voix est calme. Il faut dire qu’elle a désormais l’habitude des situations dangereuses après s’être retrouvée avec son futur mari face à des militaires ou miliciens qui braquaient leurs kalach sur elle…

Le soir du 7 avril, mon ami Jean Besse laisse un message sur mon répondeur m’annonçant le suicide de Grossouvre. Quelques minutes plus tard, Francis Zamponi de Libération m’appelle et m’annonce à son tour le suicide à l’Élysée : peu avant 20 heures, le garde du corps de Grossouvre, un gendarme du GIGN, l’a retrouvé mort, la tête à moitié arrachée par une balle du Magnum qu’il tient encore en main, dans son bureau au premier étage de l’aile ouest du palais de l’Élysée. Dominique Pin, de permanence à quelques mètres de là, a été un des premiers à voir la dépouille.

Sentiment très bizarre, entre compassion et haine. Dernière perversité, mais aussi quelle solitude. Il me revient plein de souvenirs. « J’ai raté ma vie… », « Je n’ai plus envie de vivre quand je monte l’escalier pour aller à mon bureau… ».

Quelle haine/amour à l’égard de son « ami » François Mitterrand. Mourir à ses pieds après lui avoir monté tellement de « chantiers ». Je me souviens aussi de ses deux derniers appels téléphoniques, au début du mois de mars. Il aurait souhaité que nos relations reprennent leur ancien cours. Il désirait que j’aide son fils à devenir journaliste et me demandait conseil. Il ajoutait que je devais « faire attention quand j’allais au Gabon ».

Sollicité par différents médias pour faire son portrait, je préfère me taire. Ses principaux « correspondants » dans la presse vont sortir du bois pour lui tresser des lauriers et profiter de l’occasion pour enfoncer un peu plus le président, en le désignant – plus ou moins explicitement – comme le responsable de son suicide. Jean-Marie Pontaut, dans Le Point, livre la version de Grossouvre de son entretien avec le président, après la visite du juge Jean-Pierre dans son appartement quai Branly :

« Après la visite du juge, François Mitterrand m’a dit :

– Comment a-t-il pu oser perquisitionner quai Branly et pourquoi lui avez-vous parlé ? Vous savez bien qu’il s’agit d’un ennemi.

« Je lui ai répondu, avec un brin de malice, que j’étais bien obligé de me plier à la justice et qu’en tant que président du Conseil supérieur de la magistrature il ne pouvait pas me le reprocher. J’ai ajouté :

– Je trouve en plus le juge Jean-Pierre très sympathique…

« Ce qui a mis François Mitterrand brièvement très en colère. On ne peut lui parler.



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