Les aventures de Gilles Belmonte, tome 1 : Pour les trois couleurs by Fabien Clauw

Les aventures de Gilles Belmonte, tome 1 : Pour les trois couleurs by Fabien Clauw

Auteur:Fabien Clauw [Clauw, Fabien]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman historique, Aventures, Révolution française, Guerre, Littérature française
ISBN: 2375020391
Éditeur: Éditions Paulsen
Publié: 2017-02-14T23:00:00+00:00


Avec son plafond bas, l’entrepont se chargea immédiatement de l’énergie de leur clameur.

Ne laissant rien voir de son émotion, Belmonte continua à remonter la grappe humaine qui s’écartait devant lui. Onze hommes ne crieraient plus jamais Hourra et seize autres luttaient pour survivre. Se pouvait-il qu’ils le respectent quand même ? Il n’avait pas fini de ruminer cette sombre pensée qu’un puissant écho parvint du pont :

« Hourra !

Hourra !

Hourra ! »

Le reste de l’équipage répondait aux canonniers. Ces silhouettes de toutes formes, petites et grandes, sales et noircies par le combat, n’étaient plus les hommes abrutis de désœuvrement qu’il avait croisés à Rochefort. Sur son passage, certains osaient même lui adresser un clin d’œil. Jadis, sur les bâtiments de la Royale, cette folie avait valeur d’outrage. Et l’outrage n’était passible que de la mort.

Belmonte savait combien le capitaine d’un navire pouvait imprimer sa marque. Il avait vu et admiré l’œuvre de grands officiers : Denvernet, ce vieux renard des mers ; de La Motte bien sûr ; ou encore cet excellent Bercier du Plessy qui avait été son premier commandant. Tous avaient fait d’individualités douteuses des équipages incroyables. Pour cela et pour leur humanité, Belmonte les vénérait.

Serait-il donc lui aussi capable de cela ?

Il emprunta le couloir central, traversa les cuisines et déboucha dans le poste des fusiliers. Celui-ci se peuplait à son tour des hommes en bleu que le capitaine Marbec avait enfin envoyés au repos. Là aussi, peu de lumière et une moiteur de tous les instants. Ils saluaient sur son passage avec la raideur caractéristique de ce corps épris de rigueur. Malgré tout, les visages étaient admirablement expressifs.

Tout juste descendu de l’échelle, le sergent Gropas tomba nez à nez avec Belmonte. Sa réaction fut immédiate :

– Compagnie ! Garde à vous ! hurla-t-il.

D’un seul homme, les tuniques bleues s’alignèrent en claquant leurs mains sur les crosses.

– Vos hommes se sont fort bien comportés, Sergent Gropas. Rompez, je vous prie.

Le même cérémonial accompagnait Belmonte dans sa marche vers l’infirmerie. Des regards entendus, des attitudes déférentes ponctuaient sa traversée de cette petite humanité si bien hiérarchisée au milieu de l’océan.

Belmonte arriva dans l’infirmerie. Dans la petite pièce adossée à la cloison bâbord, l’air était irrespirable. Une douzaine d’hommes, la plupart allongés à même le plancher, occupaient comme ils pouvaient l’espace exigu. C’était bien digne de la vanité des architectes de l’Égalité : leurs certitudes en leur ouvrage avaient sacrifié l’infirmerie !

Au milieu de la pièce, sous une lampe à huile qui crachait une fumée noire, le docteur Mirabon était en train de scier la jambe d’un fusilier. Celui-ci se débattait comme un diable tout en mordant un morceau de cuir, mais huit mains de compagnons le maîtrisaient fermement. Le sang gicla sous la lame. L’assistant du docteur, un ancien paysan formé au soin des vaches, retira le cuir de la bouche du fusilier et y versa du rhum à foison.

D’autres plaintes de douleur et des appels à l’aide de blessés se joignaient aux cris étouffés du malheureux amputé.

La lame du docteur Mirabon rencontra soudain l’os et le bruit glaça le sang de Belmonte.



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