Muchachas 1 by Katherine PANCOL

Muchachas 1 by Katherine PANCOL

Auteur:Katherine PANCOL [PANCOL, Katherine]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
ISBN: 9782226303240
Éditeur: Albin Michel
Publié: 2014-02-11T23:00:00+00:00


Elle avait caché une fourchette sous son oreiller et quand Ray approchait, elle le menaçait si tu me touches, je te plante la fourchette dans l’œil ! Il éclatait de rire, lui arrachait la fourchette et la jetait par terre.

Alors, elle avait caché un canif. Un canif ouvert, prêt à l’emploi. Mais il était malin, il la maîtrisait d’un bras et fouillait sous l’oreiller avant de s’allonger sur elle.

Elle recommençait.

Pour la punir, un soir, il l’avait frappée à tour de bras. Son coude se levait, retombait, faisait un V dans l’obscurité je vais te dérouiller et t’auras plus envie de jouer les petits soldats, je te promets. Il frappait, il frappait, elle serrait les dents, elle essayait de garder la tête bien droite. C’est ce soir-là qu’il lui avait éclaté le tympan gauche. Puis le droit. Elle n’entendait plus rien. Les coups résonnaient dans son corps mais elle ne les entendait pas. Elle avait été enfermée dans une boule de coton. Tout était devenu silencieux. Elle voyait la bouche de Ray bouger, ses mâchoires se désarticuler, mais elle n’entendait plus rien et cela devenait presque drôle. Elle avait éclaté d’un rire sauvage et la fureur de Ray avait redoublé, il levait le coude, il tapait et comme elle se tenait les oreilles, il avait frappé encore et encore sur les oreilles. Bang, bang, elle entendait les coups à l’intérieur, des coups lourds de tambour grave, mais plus rien à l’extérieur.

Le matin, au petit déjeuner, il n’y avait plus de bruit du tout. Elle frappait sa cuillère contre le bol, rien. Elle voyait des bouches remuer mais il n’y avait pas de son.

Bientôt elle ne sentirait plus rien du tout, elle s’était dit.

C’est comme ça qu’elle avait appris à lire sur les lèvres.

Parce que ça avait duré un sacré moment.

Elle avait arrêté d’aller en classe.

Le médecin de l’école l’avait examinée, perplexe.

– C’est peut-être un accident suite à ta formation, tu as tes règles depuis quand ? il avait demandé en remuant les lèvres de manière grotesque.

Elle avait éclaté de rire.

– Il faut que tu retournes à l’école, je parlerai à tes professeurs.

Et les professeurs prenaient bien soin de parler lentement, personne n’osait rire devant elle.

Comme s’ils savaient qu’il n’y avait pas de quoi rire.

Julie lui passait ses cours. Au début, Stella les lisait et après elle lui avait dit que ce n’était pas la peine, elle avait tout compris en classe. Violette prétendait qu’elle le faisait exprès pour se rendre intéressante. Tu crois qu’en étant mystérieuse tu vas attirer les garçons ? Tu te goures complètement, tu ferais mieux de remplir tes nichons, on dirait des cacahuètes ! Les garçons, ils préfèrent les petites doudounes bien pleines, bien rondes, bien fermes.

Je m’en fous des garçons ! elle grognait.

Et quand Violette et Julie gravaient un cœur avec leur nom sur l’écorce d’un arbre en laissant plein de place dans le cœur afin qu’un garçon vienne le remplir avec ses initiales, elle se disait qu’elles n’avaient rien compris, qu’elles étaient bêtes, qu’il ne fallait compter sur les initiales de personne pour remplir sa vie.



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