L'héritière de Salem T5 : Les Mémoires d'Abigail by Caroline Barré

Auteur:Caroline Barré [Barré, Caroline]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Chapitre 5

TON SOUVENIR ME HANTE

Descendue à la cave, Megan vérifie les herbes qu’elle a mises à sécher au début de l’arrière-saison, avant la chute des feuilles. Elle décroche chaque bouquet et s’assure que l’humidité ne s’accroche pas au feuillage qui, pour certaines variétés, lui est encore très utile. Pour les gerbes plus denses et serrées, elle glisse un doigt entre les tiges afin de laisser passer un peu d’air frais et ainsi prévenir la formation de moisissure.

Alors qu’elle s’apprête à descendre la camomille, les poils de ses bras se hérissent au point de lui faire lâcher prise. La déplaisante sensation, qui se propage sous son épiderme et qui électrise la moindre fibre de son corps, lui semble de plus en plus familière depuis la veille. À l’affût des moindres signes que pourrait lui transmettre sa grand-mère, Megan se questionne. «Est-ce bien toi? Jamais auparavant tes approches n’ont été aussi désagréables ni intenses. Que se passe-t-il? De quoi cherches-tu à me prévenir?»

Ne comprenant rien aux manifestations qui accaparent sa petite-fille, Abigail reste silencieuse. Une certitude l’habite toutefois. Elle n’est en rien l’auteure de celles-ci. «Méfie-toi, Megan. À moins que tu ne couves un vilain rhume, je parierais le salut de mon âme que quelqu’un d’autre cherche à t’atteindre.»

Megan frictionne vigoureusement ses deux bras. Possible que le fait de les garder élevés, le temps de décrocher un bouquet, suffit à lui causer ces démangeaisons. Le sang reflue alors du bout de ses doigts vers son cœur sans pour autant y revenir, du moins avec la même force et concentration que l’instant d’avant.

L’héritière reprend la manœuvre. Elle tente cependant de reposer ses membres entre chaque déplacement d’herbes séchées pour voir si un changement surviendra. Elle reste tranquille le temps d’examiner la verveine qu’elle cultive pour ses propriétés calmantes et les tiges de marjolaine, une plante aux multiples usages. Megan la préfère en infusion, mais elle réserve toujours une part de cet aromate pour sa cuisine, comme assaisonnement.

Baissant la garde au fur et à mesure de la reprise de ses habitudes, Megan est surprise par un nouvel assaut de chair de poule. Secouée de frissons, elle se crispe pour tenter de les contrôler. C’est alors que ses tempes deviennent les hôtes des tambours de guerre d’un mal de tête carabiné qui la pousse à un retrait préventif. Elle ne peut plus lutter.

Megan lève pourtant les yeux. Sans autre mouvement, elle patiente un instant puis, avec maintes précautions, elle tend un bras en direction du millepertuis. Cette plante médicinale aux fleurs d’un jaune vif soulage non seulement des maux comme les inflammations, ulcères et autres plaies, mais aussi l’anxiété ou la dépression. Elle agit tant comme sédatif antidépresseur qu’antiseptique. C’est l’un des trois végétaux qu’il lui reste à examiner. «Je ne vais quand même pas m’arrêter si près du but», s’encouraget-elle.

L’un après l’autre, les poils de ses bras se dressent. Megan sent presque leur racine percer son épiderme tellement ils pointent. Agacée par les frissons que leur mouvement provoque chez elle et persuadée que sa tête va exploser si elle n’y met pas fin, Megan laisse son travail et remonte à la cuisine.

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