Les révolutions de la biologie et la condition humaine by Patrice Debré

Les révolutions de la biologie et la condition humaine by Patrice Debré

Auteur:Patrice Debré [Debré, Patrice]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science, Life Sciences, Human Anatomy & Physiology
ISBN: 9782738150615
Éditeur: Odile Jacob
Publié: 2020-01-01T23:00:00+00:00


De la symbiose aux bactéries symbiotiques

De symbiotiques où l’adaptation est partagée, certains germes qui participent aux repas deviennent commensaux, ce qui est le cas du microbiote. Mais certaines bactéries deviennent tellement intégrées à l’hôte qu’il est parfois difficile de voir la frontière entre l’une et l’autre espèce. Il en va ainsi des mitochondries qui furent autrefois des bactéries indépendantes puis se sont retrouvées dans des cellules plus importantes pour subvenir à leurs besoins énergétiques. Cette théorie fut avancée pour la première fois par la microbiologiste américaine Lynn Margulis, au milieu du XXe siècle, puis ne fut reconnue que plusieurs décennies plus tard. Fascinée par les liens entre les êtres vivants et leur communauté de vie, elle forgea en 1991 le mot « holobionte », du grec « unité de vie », pour désigner un ensemble d’organismes qui vivent ainsi en symbiose. À ce titre, les bactéries des microbiotes représentent 99 % de l’ensemble des gènes qui composent l’holobionte homme, 1 % seulement correspondent aux gènes dits humains. Si nos cellules contiennent entre 20 000 et 25 000 gènes, les microbes que nous hébergeons en contrôlent cinq cents fois plus. Par leur multiplication et surtout leur évolution rapide, ils sont capables de répondre à de nombreux défis par leur richesse enzymatique. Les bactéries et les hommes ont sans doute un ancêtre commun. Le fil d’Ariane qui les relie est l’ADN. Un même système d’information permet d’établir un codage identique et d’utiliser une molécule appelée ATP comme unité d’énergie.

Les médecins n’ont pris que récemment conscience de l’importance du microbiote. Certes, cela s’explique aisément par les difficultés technologiques à étudier les populations bactériennes intestinales tapies au fond de nos entrailles. Vivant dans un milieu sans oxygène, elles sont rapidement détruites à son contact. Pourtant, à la question essentielle de savoir s’il est possible de vivre sans microbes, les expériences ont longtemps apporté des réponses incertaines ou contradictoires. Élie Metchnikoff, un des principaux collaborateurs de Pasteur, était persuadé de l’action délétère des bactéries dans le tube digestif, notamment dans le côlon. Il pensait que l’éradication du microbiote serait la clé de la longévité, et développa à cette occasion une théorie prônant la consommation de bacilles lactiques et de laitages fermentés pour lutter contre les effets désastreux de la flore intestinale.

Repris par les uns, discuté par d’autres, le débat sur la vie sans bactéries n’agita longtemps qu’un microcosme de scientifiques dont certains, persuadés de l’intérêt des recherches sur les animaux axéniques, ambitionnant de commercialiser toutes sortes d’espèces débarrassées de leurs bactéries. Il fallut de nombreuses expériences pour arriver à admettre avec René Dubos, chercheur à l’hôpital Rockefeller, que « les hommes et les autres mammifères ne peuvent pas survivre et vivre longtemps en bonne santé sans l’aide de certaines espèces microbiennes intimement mêlées au milieu intestinal ». En fait, pendant longtemps, du fait des microbes responsables de ravages infectieux, le microbiote fit peur au point de souhaiter sa disparition. Les antibiotiques, rapportait Macfarlane Burnet, portent en eux la promesse de l’élimination des maladies infectieuses, comme un important facteur de vie sociale.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.