Le boa et le naja by Girard

Auteur:Girard
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Archipel
Publié: 2015-01-14T16:00:00+00:00

*

« Monsieur Petites Blagues » parvient ainsi à désamorcer, d'une remarque ironique, une possible crise, à la grande fureur à la fois de Manuel Valls et de Jean-Marc Ayrault. Le premier n'apprécie guère qu'on ne prenne pas en considération ses critiques voilées, le second que le chef de l'État ne sanctionne pas celui qui prétend désormais publiquement s'installer dans ses meubles. La colère du Premier ministre redouble quand, quelques jours plus tard, l'interpellation à Trappes d'une jeune femme convertie à l'islam au motif qu'elle porte, en contravention avec la loi, un voile intégral, ainsi que celle de son compagnon provoquent des émeutes faisant craindre un été chaud dans les banlieues sensibles. C'est pour le chef du gouvernement une occasion en or d'accréditer l'idée que la ligne dure du ministre de l'Intérieur, en ce domaine comme en d'autres, revient à jeter de l'huile sur le feu et à entraver l'action du gouvernement comme la mise en œuvre des réformes inscrites dans le programme socialiste.

Pour ce faire, Matignon n'hésite pas à faire fuiter en direction de la presse, plus précisément du Monde, une note que le ministre de l'Intérieur a fait parvenir à l'Élysée, le 25 juillet, pour exprimer sa totale opposition au projet de réforme de la justice pénale défendu par son ennemie jurée, la garde des Sceaux Christiane Taubira. Dans ce texte, publié le 13 août 2013 dans le quotidien du soir, le ministre de l'Intérieur tire à boulets rouges sur le laxisme supposé de sa collègue, dont les propositions viseraient rien de moins qu'à encourager tacitement la récidive plutôt qu'à la prévenir : « Ce projet de loi part d'un premier postulat que je ne peux intégralement partager : la surpopulation carcérale s'expliquerait exclusivement par le recours par défaut à l'emprisonnement et par l'effet des peines planchers. » À l'exact opposé de Christiane Taubira, Manuel Valls plaide pour « une exécution ferme des peines de prison, même les plus courtes », se montrant ainsi cent fois plus répressif que la droite, laquelle avait, en 2009, érigé en principe de droit l'aménagement des peines de prison inférieures à deux ans.

Le Monde publie également la réponse de Christiane Taubira à cette note, une réponse dans laquelle elle fait part de sa totale opposition aux objections formulées par son collègue : « Nous sommes au point au-delà duquel on peut aller sans dénaturer la réforme, sauf à se priver des outils nécessaires pour lutter contre la récidive et renoncer à une réforme de rupture telle qu'attendue et telle qu'annoncée pendant la campagne présidentielle. » Pour elle, il ne fait aucun doute qu'en écrivant directement au chef de l'État, passant par-dessus la tête du Premier ministre, Manuel Valls a délibérément porté atteinte à la solidarité gouvernementale et voulu empêcher l'adoption du projet de loi préparé par ses services. Matignon a beau jeu d'afficher une neutralité de façade, minimisant la rivalité entre les deux ministres : « Qu'il y ait des divergences d'appréciation entre les ministres de la Justice et de l'Intérieur, cela n'est pas anormal.

Télécharger

Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.