Le hameau des purs by Sonja Delzongle

Auteur:Sonja Delzongle [Delzongle, Sonja]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Thriller
ISBN: 9788799473021
Éditeur: ToucheNoire
Publié: 2012-03-06T23:00:00+00:00

Elle regarda la porte. De l’autre côté, celle de la chambre de Tiberge, scène de baise à peine deux jours avant et si vite devenue scène de crime. Sa main brune sur sa nuque, son dos, ses mots avant que chacun ne s’endorme dans son lit.

Audrey attendait le moment où elle allait craquer, éclater en sanglots, mais rien ne se passa. Elle avait envie de hurler, pourtant, son esprit ne comptait pas laisser de répit à ses émotions et continua de faire son travail.

Frank et elle s’étaient quittés la veille sur un accrochage violent. Elle sentait encore l’impact de ses doigts sur sa pommette gauche. Pour un peu, il aurait pu lui toucher l’œil.

Sa mort était survenue dans la foulée de leur dispute en public au sujet de sa découverte sur le meurtre de ses deux frères. La mort de Frank Tiberge avait-elle été écrite, programmée bien avant, comme celle de Paul et Pierre Tiberge ? Ou bien leur vive discussion en était-elle à l’origine ?

Cette fois, l’Empailleur était sorti du cadre. Le corps « ouvré » n’était plus exposé dans un contexte naturel, dans la forêt, sur l’herbe ou dans un champ, mais dans un lieu habité. Où avait-« il » pu tuer Tiberge sans attirer l’attention, pour, ensuite, avoir tout le loisir de vider le corps, puis de le reconstruire autour d’une structure de branches et de mousse entrelacées ?

Elle n’osa pas imaginer qu’« il » pût avoir œuvré la nuit durant dans la chambre même. Tranquillement évidé le corps de Frank avant de le reconstituer et le recoudre, tandis qu’elle dormait juste en face. Deux portes ! Deux portes et un couloir la séparaient du tueur en pleine action !

Saisie d’une sorte de masochisme sourd, assise sur le lit, elle fixait la porte, se passant et repassant le film. La nuit de l’avant-veille lui revint en mémoire. « Sa » présence, l’espace partagé, « ses » doigts sur ses cheveux, « son » souffle si proche… et « ses » mots, un murmure étouffé : « Petite, la vérité, tu la connais, elle est au fond de toi. Fais attention. » Était-ce un avertissement ? Avait-il voulu la prévenir qu’il allait encore frapper ? Plus près d’elle, cette fois… Allant jusqu’à transgresser la date fatidique. Il lui signifiait qu’elle devait comprendre le sens de ses actes. Qu’elle en détenait la vérité, quelque part, en elle.

Il lui fut impossible de rester plus longtemps dans sa chambre. Elle fourra son appareil photo dans son sac avec un paquet de Camel qui ne lui ferait pas la soirée et se précipita hors de cette atmosphère de mort. Un arrêt devant la chambre de Frank. Sa main sur la poignée. Non ! C’est une scène de crime. Il n’est plus là.

Elle se mit à courir dans le couloir, jusqu’aux escaliers qu’elle descendit en trombe pour heurter de plein fouet Lagarde qui s’apprêtait à monter.

– Vous partiez ?

– Euh, oui, prendre un peu l’air, c’est…

– Je vous apportais les photos, coupa le flic, comme s’il voulait éviter toute dérive émotionnelle.

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