Black Star Nairobi by Mukoma Wa Ngugi

Black Star Nairobi by Mukoma Wa Ngugi

Auteur:Mukoma Wa Ngugi [Ngugi, Mukoma Wa]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier, Afrique, Terrorisme, Littérature américaine
Éditeur: Éditions de l'Aube
Publié: 2013-06-15T07:00:00+00:00


Chapitre 9

CHOISIR ENTRE TIJUANA ET LE CHOLÉRA

Le Mexique. Nous étions en route pour le Mexique. Putain, comment se faisait-il que quelques années seulement après avoir quitté mon pays, je sois obligé d’y retourner clandestinement ? Cela dit, après tout ce que j’avais vu ces derniers jours, l’idée qu’un flic noir américain soit contraint de se glisser en douce dans son pays en passant par le Mexique aurait dû me paraître anodine.

Il ne m’avait pas été facile de quitter les États-Unis pour m’installer au Kenya, mais Muddy vivait là-bas et je me devais de la rejoindre. Je me remémorai la première fois que je l’avais vue sur scène, déclamant son texte avec une sensualité grave qui imposait autant le respect que l’admiration. La personnalité de Muddy ne se résumait pas à ça. Je l’avais compris dès notre rencontre. Pourtant, il n’est pas facile, même par amour, d’abandonner tout ce qu’on a connu et tout ce qu’on aurait pu devenir, tout ce qu’on avait espéré devenir. J’avais dû laisser des amis derrière moi ; je venais d’être promu. Pour être franc, je me demandais souvent si, étant leur seul enfant, je n’avais pas trahi mes parents.

D’un autre côté, j’avais de bonnes raisons de partir. Au Kenya, ma peau ressemblait à celle de tout le monde, je faisais partie de la majorité. Toutefois, ça ne faisait pas de moi un autochtone : ceux avec qui j’interagissais remarquaient tout de suite mon accent, mon « américanité », et j’avais fini par accepter l’idée qu’ils fassent partie de moi. Ce que j’avais refusé d’accepter, c’était qu’on m’appelle mzungu – c’était un terme provocateur, comme si un homme blanc me traitait de nègre.

Vivre loin de chez soi, vivre comme un immigré au milieu des personnes noires comme moi – viendrait-il un jour où chacun pourrait se sentir chez lui où il le voudrait ? Pour ma part, j’avais choisi le Kenya – viendrait-il un jour où ce pays, ou n’importe quel autre endroit, me choisirait ? Où il me considérerait vraiment comme l’un des siens ?

Il fallait que j’apprenne le kiswahili. Il est vrai que la plupart des Kenyans étaient contents de travailler leur anglais, une espèce d’anglais rap, avec un Américain, mais tout de même, O, Muddy, Janet et n’importe quel client de la Broadway’s Tavern auraient pu être mes professeurs. En même temps, je ne pouvais m’empêcher de résister, de rechigner à trouver définitivement ma place dans ce pays. Je commençais même à me demander si, au fond de moi, je ne préférais pas que les choses restent ainsi – si, quelque part, je n’avais pas envie de rester américain. Les rêves que j’appréciais le plus étaient ceux où je me gavais de nourriture malsaine – pizza Dominos croulant sous la viande, Double Cheese Bacon XXL du Paradise, un bar de ma bonne vieille ville de Madison.

J’étais cependant certain d’une chose : l’idée de rentrer chez moi, aux États-Unis, m’enthousiasmait. La Californie et le Wisconsin n’ont pas grand-chose en commun, mais c’était tout de même mon pays. Si nous résolvions l’affaire, peut-être que j’emmènerais Muddy à Madison pour la présenter à mes parents.



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