Marion, une femme en devenir by Tremblay D'Essiambre Louise

Auteur:Tremblay D'Essiambre, Louise [Tremblay D'Essiambre, Louise]
La langue: fra
Format: epub
Tags: roman
Publié: 2019-04-04T00:00:00+00:00

CHAPITRE 6

Le samedi 31 août 1929, au chalet de Félicité et d’Irénée, par une belle matinée ensoleillée

Adam avait dû faire trois voyages pour tout transporter, tellement il y avait de plats et de bols remplis de salades, de canapés, de viandes froides et de pâtés !

— Dommage que je ne sois pas invité moi aussi ! avait-il noté. Vous vous êtes vraiment donné beaucoup de trouble, madame Légaré. Mais je me demande… Où est-ce que vous allez mettre tout ça, en attendant le repas ?

Par chance, Félicité avait prévu le coup, et, par l’entremise de l’épicier de Pointe-aux-Trembles, elle avait demandé que le vendeur de glace passe par le chalet.

— On va être ben du monde pour le dîner, lui avait-elle expliqué. Pas sûre pantoute que le petit frigidaire électrique qu’Émile a tenu à m’offrir pour le chalet va être assez grand pour mettre toutes les provisions dedans. Mais dans la shed, au fond du jardin, je pourrais installer une couple de caisses en bois avec du bran de scie pour conserver de la glace, comme dans le temps, avec les glacières. Avec ça, j’ai dans l’idée qu’on devrait arriver à se débrouiller pas pire. Pensez-vous que le marchand de glace pourrait faire une exception, pis passer par chez nous, vendredi prochain ?

— Inquiétez-vous pas, ma p’tite dame, m’en vas toute vous arranger ça !

Ce qui fut fait. La journée s’annonçait donc parfaite. Le vent qui avait soufflé une bonne partie du mois d’août était miraculeusement tombé durant la nuit et le fleuve brillait comme un coffret rempli de bijoux précieux.

Une fois les denrées mises au froid, Éléonore, qui n’en était pas à une réception près, proposa d’installer une table de fortune sur la pelouse.

— Je vois que vous avez trouvé pas mal de chaises, mais pour ceux qui n’aiment pas manger debout ou tout bonnement assis sur une petite chaise droite, il me semble qu’on pourrait ajouter une table, juste là, sous le gros érable, suggéra la cuisinière.

— Mais j’ai pas ça, moi, une deuxième table ! s’affola Félicité.

— Deux ou trois tréteaux, quelques planches, et ça suffit, vous savez ! Plus un drap propre, qui peut facilement remplacer la nappe. Même au manoir, il nous arrive de monter des tables comme celle-là, quand on veut manger à l’extérieur.

— Ah ouais, au manoir, vous faites ça ? J’aurais pas cru. Mais pour la nappe, par exemple, j’y aurais pensé toute seule. On utilise souvent des draps, durant les réceptions du temps des fêtes, quand on se retrouve à court de linge propre… Laissez-moi voir à ça !

Félicité regarda autour d’elle, claqua la langue d’impatience, puis, mettant ses mains en porte-voix, elle cria :

— Irénée ?

Il n’y eut aucune réponse.

— Veux-tu ben me dire où c’est qu’il se cache, lui là ? se demanda-t-elle, en prenant Éléonore à témoin. Chaque fois que j’ai besoin de lui, on dirait qu’il fait exprès pour disparaître ! Pourtant, me semblait l’avoir vu t’à l’heure en train de fumer sur la plage.

Se fiant à

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