Lui & Moi by Alice Feeney

Auteur:Alice Feeney [Feeney, Alice]
La langue: fra
Format: epub
Tags: FICTION / Thrillers
Éditeur: Hauteville
Publié: 2022-01-05T00:00:00+00:00

Rachel m’avait prise sous son aile dès le premier jour, et je lui en étais infiniment reconnaissante. C’était la fille la plus populaire de notre classe, ce qui me semblait naturel parce qu’elle était belle, intelligente et charmante. Enfin, c’est ce que je croyais. Elle s’investissait toujours dans des bonnes causes, déjà à l’époque, des événements sportifs ou des ventes de gâteaux au profit d’associations caritatives. Au début, je ne voyais pas les choses ainsi, mais au bout de quelques semaines, j’avais commencé à me demander si je n’étais pas une nouvelle mission humanitaire à ses yeux.

Elle m’invitait chez elle, elle me prêtait des vêtements et m’avait appris à me maquiller. Ce que je ne faisais pas avant. Elle aimait me mettre du vernis quand nous passions du temps ensemble, une couleur différente chaque fois. Parfois, elle écrivait des trucs sur mes doigts, une lettre par ongle pour former un mot : MIMI, CHOU, JOLIE étaient ses préférés. Elle disait tout le temps que j’étais gentille, et c’est encore l’adjectif que les gens utilisent le plus souvent pour me décrire. Un qualificatif que je déteste. L’enchaînement de ces syllabes, qui voudrait passer pour un compliment, sonne comme une insulte à mes oreilles. Comme si être gentille était un défaut. Mais peut-être en est-ce un. Et peut-être que je le suis réellement.

Rachel m’achetait régulièrement des petits cadeaux – du gloss, des chouchous, parfois des jupes ou des débardeurs un peu trop serrés pour m’encourager à perdre du poids –, et une fois elle m’a emmenée chez le coiffeur pour faire un balayage comme elle. Elle savait que je ne pouvais pas me payer ce genre de choses, et elle insistait pour me les offrir. Je me demandais d’où venait cet argent, mais je ne lui avais jamais posé la question. Rachel me laissait m’asseoir à sa table avec ses amies pendant la pause-déjeuner, ce qui me faisait très plaisir. Certaines filles passaient le midi toutes seules, et je ne voulais pas finir comme elles.

Catherine Kelly me paraissait sympathique. Elle mangeait toujours des biscuits ou des chips, et avait l’air un peu étrange avec ses cheveux presque blancs, son appareil dentaire et ses vêtements sales, mais elle ne faisait ni ne disait rien de mal. Elle ne parlait presque pas, restant le plus clair de son temps dans son coin à lire des livres. Des romans d’horreur, j’avais remarqué. J’avais entendu dire que sa famille vivait dans une demeure inquiétante au milieu des bois, à l’écart de la ville. On prétendait que c’était une maison hantée, mais je ne croyais pas aux fantômes. Je trouvais dommage qu’elle n’ait pas de copines du tout, j’avais pitié d’elle.

— On pourrait proposer à Catherine de s’asseoir avec nous, non ? avais-je suggéré un midi en chipotant devant l’interprétation des lasagnes-frites des dames de la cantine.

Mes camarades m’avaient dévisagée comme si je venais de les insulter.

— Non, m’avait répondu Rachel, qui était assise en face de moi.

— Tu vas manger tout ça ? m’avait demandé Helen d’un air dégoûté.

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