Les Alpes suisses (première série) by Eugène Rambert

Les Alpes suisses (première série) by Eugène Rambert

Auteur:Eugène Rambert
La langue: fra
Format: mobi, epub
Tags: Essai/Montagne Alpes
Éditeur: Bibliothèque numérique romande
Publié: 2015-08-26T22:00:00+00:00


Figure 26 Rose des Alpes

Peut-être n’a-t-on jamais fait à la nature de plus sensible outrage qu’en émondant le rosier, jusqu’à ce qu’il devienne un petit arbre, dont le tronc nu se termine par un paquet rond de feuillage. Le rosier est un buisson ; il ne porte pas des rameaux, il pousse des jets. Pourquoi faire disparaître un contraste aussi heureux que celui d’une fleur aux formes chastes et pures sur un fouillis de souches épineuses, de tiges entrelacées, de longs jets ondoyants, qui s’échappent au-dehors et se suspendent dans les airs ? Rien de plus agreste que le rosier. Laissons-le croître dans nos bosquets, massons-le en haies irrégulières et touffues, qu’il grimpe en espalier avec de libres pousses retombantes ; mais ne le transformons pas en un arbre manqué. N’est-ce pas une seconde faute que de faire doubler la rose ? Les étamines s’y prêtent de si bonne grâce qu’elles semblent nous y inviter elles-mêmes, et il faut reconnaître que, dans quelques variétés, la ceinture des pétales est un peu dégarnie et demande à être renforcée ; mais est-il nécessaire pour cela de changer en une boule pesante cette corolle légère, la plus parfaite qui existe ? – Quelques pétales arrondis, amples et plus ou moins découpés en cœur, attachés à leur centre commun par un onglet très court, juste ce qu’il faut pour les dégager, formant ensemble, autour d’un bouquet d’étamines, une coupe diaphane, qui s’ouvre toujours davantage et dont la courbe est un chef-d’œuvre de grâce sans mollesse : voilà la rose, et voilà aussi la véritable élégance, l’élégance native, idéale, divine, pure de toute recherche aristocratique, qui n’est que la distinction suprême et la perfection de la beauté. Il y a plus de libre fantaisie dans le support de la coupe, dans ce calice aux sépales ciselés, couverts parfois de toute une végétation de mousses en miniature, mais il révèle aussi une pensée d’harmonie : par les riches découpures de chaque sépale il rappelle la variété et les accidents du feuillage, tandis que sa disposition régulière annonce et prépare la beauté simple de la corolle.

Faire naître de la ronce la reine des fleurs, tel est le problème qu’a résolu la nature le jour où elle a créé le rosier, tel est le motif qu’elle a reproduit dans toutes les espèces du genre, en le variant avec une inépuisable richesse d’invention. Quelques-unes de ces ronces devenues rosiers, portent de petites fleurs mignonnes et joufflues comme la figure d’un enfant qui sourit ; d’autres, avec leurs blanches corolles, semblent nées pour décorer le tombeau des vierges ; d’autres encore se couvrent de grandes fleurs aux pétales pourpres et veloutés, qui rivalisent de luxe, de richesse, de magnificence avec ce que l’on peut voir ou rêver de plus éclatant. Mais toujours, que la beauté en soit plus gracieuse, plus touchante, plus splendide, toujours c’est la fleur accomplie naissant d’un buisson sauvage et tout hérissé d’épines. Il en est des créations de la nature comme de celles de l’art :



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