Les Alpes suisses (deuxième série) by Eugène Rambert

Les Alpes suisses (deuxième série) by Eugène Rambert

Auteur:Eugène Rambert
La langue: fra
Format: mobi, epub
Tags: Essai/Nouvelles/Montagnes Alpes
Éditeur: Bibliothèque numérique romande
Publié: 2015-10-18T22:00:00+00:00


Figure 17. Brunies et éprouvées par le temps, avec leurs galeries sculptées.

Cependant Gaspard prenait goût aux chants des bergers ; il les écoutait avec plaisir, et, quoiqu’il ne chantât guère lui-même, il y avait dans son cœur quelque chose qui y répondait. Il voyait aussi d’un œil bien différent la vallée où s’abrite Rossinières et les monts qui la dominent. Il s’y plaisait sans savoir pourquoi. C’était, sans doute, la grâce rustique du paysage, la fraîcheur reposante des teintes, et cet air d’abondance et de bien-être, qui agissaient doucement sur son cœur jadis ulcéré, maintenant amolli et ouvert à la sympathie. Surtout il ne regardait plus ces jolies maisons en bois comme de tristes palais, faits pour la richesse et l’orgueil. Il ne les maudissait plus du sein de sa misère. À les voir si chaudes et proprettes, bien fermées, soigneusement bâties, à la fois brunies et éprouvées par le temps, avec leurs galeries sculptées tout autour et leurs religieuses inscriptions, qu’il aurait bien voulu savoir lire, non seulement il comprenait qu’on les habitât, mais des rêves confus de bonheur domestique, de vie à deux, abritée sous un de ces toits paisibles, commençaient à germer dans son cœur et à en éloigner cet âpre désir, cette sombre vision, de sauvage indépendance sur les rochers de Praz-de-Fort. Il y en avait une surtout, sur laquelle se fixait sa pensée, et dont l’image était pour lui celle du paradis sur la terre. Depuis qu’il y était entré, conduit par la main de Caroline, il ne l’avait plus revue, sauf du haut de la montagne, d’où il en découvrait le toit et une fenêtre. Aucune force humaine n’aurait pu le décider à passer dans la rue qui y conduit. Mais il l’avait aussi présente à l’esprit que s’il avait pu y retourner chaque jour ; il voyait le chèvre-feuilles – un de ces chèvre-feuilles comme on n’en trouve qu’à la montagne – qui s’arrondissait en berceau au-dessus de la petite porte d’entrée, qui s’enlaçait aux vieilles poutres de la galerie, et de là grimpait jusque sur le toit, pour retomber sur le devant en masses luxuriantes, riches de fleurs et de parfums. Il voyait la file de pots à fleurs, sous le poids desquels la galerie pliait, ici un œillet cossu, là des buissons de petites roses blanches, ailleurs des capucines, suspendues à des fils invisibles et poussant de l’un à l’autre leurs longues tiges envahissantes. À travers toute cette verdure, il voyait de petites fenêtres bien claires, avec des rideaux blancs, et le plus souvent ouvertes, afin de laisser entrer les parfums du dehors. Il est douteux qu’un architecte eut partagé la préférence de Gaspard. Il y en avait d’autres dans le village plus coquettement bâties, plus artistement décorées. Mais Gaspard avait son idée, et la Grande-Maison, elle-même, ne valait pas à ses yeux la maisonnette du régent. Les architectes à part, plus d’un en eût jugé comme lui. Toutes ces plantes avaient un air de santé, qui disait assez quelle main



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