Tocaia grande. La face cachée by Jorge Amado

Tocaia grande. La face cachée by Jorge Amado

Auteur:Jorge Amado [Amado, Jorge]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 2253053155
Éditeur: Stock


4

— C’est à vendre, compère ? J’ suis amateur.

Le colonel Boaventura Andrade plaisantait ; il venait de parcourir de bout en bout la fazenda Boa Vista, admirant les plantations, les parcelles qui venaient d’être mises en culture, les cacaoyers en pleine croissance. Il n’y avait qu’à la fazenda da Atalaia qu’on pouvait voir une exploitation semblable, aussi bien menée.

Le colonel venait précisément d’inspecter ses propriétés, immense latifundium. Le fonds initial qu’il avait défriché et planté bien des années plus tôt lorsqu’il avait débarqué dans ce pays du sud de Bahia, avec l’allant de la jeunesse, en provenance du Sergipe : une fois devenu premier commis de la firme Lopes Machado & Compagnie, à Estância, il ne lui restait qu’à piétiner sur place. Il lâcha tout et s’en alla. Deux autres fazendas, limitrophes de la première, se joignirent à celle-ci ; il les avait achetées dans de bonnes conditions lors des premiers conflits, quand Itabuna était encore Tabocas et que le chemin de fer restait un songe.

Avec les luttes qui marquèrent la conquête des terres encore libres de la rivière aux Serpents, il avait pu doubler la superficie de son domaine. C’est là que se trouvaient les cacaoyères où venaient d’avoir lieu la première floraison et la première cueillette. De quoi réjouir l’œil.

À peine Venturinha avait-il repris le chemin de Rio de Janeiro — toujours le même refrain : ce cours terminé, je reviens pour de bon, je ne reste là-bas que pour me perfectionner, je ne perds ni temps ni argent pour rien, ne vous en faites pas — que le colonel avait décidé d’effectuer avec Natario la tournée habituelle et indispensable : qui ne veille pas personnellement sur ce qui est à lui ne mérite pas de l’avoir et n’a pas le droit de se plaindre. La longue promenade à cheval, commencée avant le lever de soleil, interrompue de cacaoyère en cacaoyère, lui avait réchauffé le cœur et fait oublier l’absence de son fils, cette épine empoisonnée qui lui altérait le sang. Elle lui avait aussi permis de constater une fois de plus la compétence et la probité du gérant. Les éloges ne suffisaient pas, Natario méritait estime et gratitude. Aussi le colonel annonça-t-il, au lieu de retourner directement chez lui :

— Je veux voir aussi tes plantations à toi, et la maison que tu as faite pour la commère et toi, dans ce fameux coin, là : comment ça s’appelle, au juste ?

— Tocaia Grande, colonel.

Le colonel Boaventura Andrade étendit son regard sur les cacaoyères, se remémorant d’autres temps, d’autres randonnées en compagnie de Natario :

— J’en ai entendu causer. De temps en temps, un muletier en parle Bien vilain nom pour un endroit aussi beau.

— C’est vrai, colonel. Mais c’est trop tard pour changer.

— Dans la vie, y a un motif pour tout, Natario, et personne n’a le droit de faire des changements. C’est comme les surnoms : quand ça prend, y a plus rien à faire.

Pénétrant à l’intérieur de la cacaoyère, le fazendeiro, transporté à la



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