Nous avons tous des secrets by Philippe Savin

Nous avons tous des secrets by Philippe Savin

Auteur:Philippe Savin [Savin, Philippe]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Auto-Édité
Publié: 2022-11-03T00:00:00+00:00


40

Le père de Léa Marchand vit dans les hauteurs de Saint-Jean. Dans une maison avec peu d’attraits. Un cube froid.

Un individu s’engage dans l’allée dès que nous nous garons. Il devait nous guetter.

— Monsieur Marchand lui lance aussitôt Thomas. Je me présente, Thomas Gauthier. Voici Julia Delange.

Il me considère d’une façon étrange. Je crois qu’il sait qui je suis. Mon nom et mon visage ont été dans tous les médias. Et parfois, ils le sont encore maintenant.

Ou alors, je lui rappelle peut-être tout simplement sa fille disparue. Nous nous ressemblions un peu.

— J’aurais certainement dû vous prévenir que je ne serai pas seul, enchaîne Thomas. Je suis navré. Julia est quelqu’un de confiance et…

Le père de Léa agite sa main en l’air.

— Ça va, il n’y a aucun problème. Entrez.

— Je vous remercie.

Nous nous arrêtons sur le perron de la maison et en m’avançant vers Thomas, mon épaule frôle brusquement son torse. Je suis troublée.

Monsieur Marchand croise ses bras sur sa poitrine et s’adosse contre le mur.

Thomas sort un calepin de la poche arrière de son jean.

— Est-ce que cela vous dérange si je prends des notes ?

— Non.

— Est-ce que vous avez gardé les affaires de Léa ?

— Oui, bien sûr. Nous n’avons pas pu nous résoudre à nous en débarrasser. Lorsque nous avons dû rendre son appartement, on a stocké une partie de ses affaires dans son ancienne chambre. C’est tout ce qui me reste d’elle.

— Pourrions-nous voir sa chambre ?

— Suivez-moi.

Thomas entre le premier dans la pièce pendant que monsieur Marchand me laisse le passage.

Je pénètre dans un long couloir envahi d’un tas de photos de Léa à divers âges de sa vie. Tous ces clichés m’angoissent un peu. Léa semble me dévisager. Parfois souriante, parfois inquiète. Et parfois avec un air noir qui me rappelle comment elle se comportait avec nous.

Un frisson parcourt mon corps.

Lorsque je franchis le seuil de la porte, je découvre une pièce parfaitement rangée. Trop en ordre. Il n’y a pas un brin de poussière. Tout est à sa place, enfermé dans les placards ou posé sur les étagères. C’est presque inquiétant. Déstabilisant en tout cas. Cette pièce donne l’impression de faire partie d’un musée. C’est la chambre d’une morte dont on entretient le souvenir. Cette réflexion me dérange, mais c’est le sentiment qui me vient immédiatement à l’esprit.

Thomas s’assoit sur la chaise du bureau, le père de Léa, sur un petit tabouret en bois. Quant à moi, je reste debout, près de la fenêtre. Je n’ai pas envie de m’asseoir sur le lit d’une morte.

J’examine monsieur Marchand sans qu’il s’en aperçoive. Il a les yeux rivés sur le portrait de sa fille accroché sur l’un des murs. Marchand est un type élégant. Ses cheveux sont foncés et coupés très court. Il est vêtu d’une chemise bleue et d’un pantalon en toile beige.

Et c’est à ce moment-là que je revois les images du corps de sa fille, allongé sur le bitume. Des images qui flottent dans mes pensées. Mes doigts se crispent.

—



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.