Nom by Debré Constance

Nom by Debré Constance

Auteur:Debré, Constance [Debré, Constance]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Flammarion
Publié: 2022-02-01T23:00:00+00:00


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Un port commercial de seconde zone près de Perpignan. Les cargos sous les fenêtres, le bruit des grues, le déchargement des conteneurs la nuit. Dans le salon il y a une affiche I want to believe avec une soucoupe volante. Des gens comme moi le confinement ça les arrange, des gens comme moi le confinement ils ne le remarquent même pas ou bien ça les amuse, ça fait des occasions d’aventure. Les gens comme moi aiment les catastrophes légères pour l’ambiance philosophique que ça donne au monde. J’ai dit oui à cette fille que j’ai vue deux fois, une après-midi à Saint Étienne et une nuit à Paris, j’ai mis l’ordinateur dans un sac un jean et deux tee-shirts et j’ai quitté ma chambre du quatorzième. J’essaye, j’essaye toujours, je suis un chevalier de la foi et à chaque fois j’y crois. La journée on travaille, A. peint, j’écris. A. m’a installé un lit dans l’atelier. Le sexe c’est l’après-midi. La nuit on dort, chambre à part. A. est allée voir un chaman en Amazonie, A. est allée près de la zone 51 de Roswell dans le Nevada. A. parle de la fin du monde, A. dit que depuis l’enfance, elle fait son rêve de la fin du monde qui reprend chaque fois à l’endroit où il s’est arrêté, A. parle d’un autre monde derrière le monde. A. a des yeux verts glacés brûlants, je crois que c’est pour ça que je suis là, et pour l’affiche d’X-Files dans le salon. A. dit qu’elle est une fille, mais elle parle d’elle au masculin, souvent mais pas toujours, elle s’est donné un prénom de garçon, elle dit aussi qu’elle s’en fout, ou qu’il s’en fout, que ce n’est pas si important pour elle ou lui, mais que c’est important d’avoir les couilles d’être une fille, sexy comme Felix Maritaud, je lui dis parfois. Elle dit que moi non plus je ne suis pas vraiment une fille. Elle dit que je suis son mec, sa meuf, qui elle aime. Elle dit que quand on couche ensemble on n’est ni des filles ni des garçons, qu’on baise autrement. Elle disait qu’elle voulait des photos de ma main sur son sexe, qu’elle me ferait un tatouage à la fin du confinement, que ça fragilise un tatouage, qu’il fallait attendre. On n’a jamais fait la photo ni le tatouage. Je suis restée six semaines et puis je suis partie. Si je ne l’aimais plus, pas assez, ou pas tout court, qu’est-ce qu’elle y pouvait, qu’est-ce que j’y pouvais. Le matin où je le lui ai dit, la veille de mon train, elle a pris la Polo, elle est allée au Lidl, elle a acheté de la liqueur de pamplemousse et une bouteille de rosé, elle a dit que c’était ce qu’on buvait chez son père, à Vesoul, elle s’est mise à la fenêtre et elle a bu, elle a fumé, j’avais le mauvais rôle ou bien le bon, je ne sais pas, il n’y avait pas grand-chose à dire.



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