La vie ne se danse jamais seul by Marie Joudinaud

Auteur:Marie Joudinaud [Joudinaud, Marie]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman, Famille, Danse, Littérature française
Éditeur: L'Archipel
Publié: 2023-04-15T00:00:00+00:00

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SUSANNE

Le réveil sonna aux aurores mais Susanne ne dormait déjà plus depuis plusieurs minutes. Elle scrutait le plafond de sa chambre en se prélassant sous la couette, écoutait les premiers oiseaux chanter dans le jardin. Elle se leva finalement et se dirigea vers la salle de bains attenante à sa chambre. Elle tira le rideau de douche, accrocha péniblement le pommeau à la vieille colonne branlante et songea que cette pièce nécessitait, elle aussi, des travaux… Ceci dit, il fallait déjà que le couvreur en finisse avec le toit : il avait commencé à travailler la semaine précédant les vacances scolaires et procédait apparemment au rythme escompté. Si la météo les laissait tranquilles, les ouvriers achèveraient leur œuvre en temps et en heure. Susanne était fière de ces réparations, elle avait le sentiment de rendre un peu de lustre à cette vieille bâtisse qu’elle aimait tant.

Elle se glissa sous une douche bien chaude et, les yeux fermés, laissa l’eau ruisseler sur sa peau et ses cheveux ; puis elle coupa le robinet, et se sécha en s’observant dans le miroir qu’elle avait installé contre la porte de sa chambre. Le temps et sa grossesse avaient marqué son corps, mais elle ne se trouva pas si mal. Lors de leur dernière promenade en mer, Henry lui avait demandé quand elle se déciderait à inviter Pablo, le nouveau professeur d’espagnol des Dunes, à prendre un verre avec elle. Apparemment, elle ne le laissait pas indifférent et Susanne l’aimait bien, elle aussi. Elle avait retourné la question à son ami et il avait pris un air énigmatique pour lui annoncer qu’il avait quelqu’un en tête depuis quelque temps. Elle l’avait habilement interrogé mais il n’avait rien révélé de son secret, alors elle l’avait laissé tranquille. Celle qui séduirait Henry serait sacrément chanceuse, tant il savait se montrer doux et prévenant. Elle soupira en délaissant le miroir. Peut-être avait-il raison ? Peut-être était-il temps de baisser la garde ?

En réalité, Susanne se trouvait bien seule. L’indépendance et la liberté avaient été sa devise pendant si longtemps qu’elle ne savait plus faire autrement. Elle avait le sentiment de se suffire à elle-même d’une certaine façon. Son travail l’occupait énormément, il la passionnait même de sorte qu’elle passait un temps infini à préparer ses séquences, ses ateliers, ses projets… Elle cherchait à se renouveler sans cesse, à expérimenter de nouvelles pédagogies, de nouveaux types d’exercices. Elle aimait le lien qui se tissait au fil de l’année avec ses élèves, cette confiance progressive qui s’installait entre eux. En première, ils l’accaparaient plus particulièrement : il fallait préparer le bac, l’écrit comme l’oral, s’assurer qu’ils disposaient de tous les outils pour donner le meilleur d’eux-mêmes. C’était un beau défi, terriblement exigeant et responsabilisant. Et quand elle quittait les Dunes pour rejoindre la Kea, elle retrouvait sa Clara : elle l’aidait à faire ses devoirs, l’écoutait raconter sa journée, ses petites histoires d’amitié déçue ou retrouvée… Elles dînaient ensemble, regardaient un film, lisaient parfois. Lorsqu’Henry se joignait à elles, ils s’installaient dans la salle à manger pour faire un jeu de société endiablé.

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