Les sillons de la souffrance by Marianne Lemaire

Les sillons de la souffrance by Marianne Lemaire

Auteur:Marianne Lemaire [Lemaire Marianne]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Afrique, Côte d'Ivoire, Sénoufo (peuple), conditions rurales, travail, travailleurs agricoles
ISBN: 9782735117796
Éditeur: Éditions de la Maison des sciences de l’homme, CNRS Éditions
Publié: 2020-03-26T17:23:18+00:00


Le travail au lieu de l’alliance

De même que c’est un cultivateur qui, en la personne du nourrisson, est né, c’est un cultivateur qui, en pays sénoufo tyebara, cherche et trouve − éventuellement − une épouse. Parce que le cultivateur que le nouveau-né était appelé à devenir s’est effectivement affirmé comme tel au moment de se marier, son identité de cultivateur ne réclame désormais plus d’être symbolisée à l’aide d’un outil de travail tel que le sarcloir, mais d’être actualisée à travers les travaux réels qu’il est en devoir d’accomplir pour ses beaux-parents. Une femme ne saurait être définitivement « donnée » sans que de nombreux travaux aient été réalisés par son mari. Le moment de l’accomplissement de ces travaux varie selon le type d’union ; leur nature varie selon l’identité de leur bénéficiaire.

Presque invariablement virilocale pour une femme mariée, la résidence est tantôt patrilocale et tantôt avunculocale pour un homme. Si un petit garçon passe toujours ses premières années auprès de sa mère et, partant, auprès de son père, il peut être « appelé » à l’âge de cinq ou six ans par un oncle utérin. Tel ne doit pas avoir été le cas pour qu’une fois l’enfant devenu adulte, le père offre à son fils une femme de son propre matrilignage, jouant donc en quelque sorte le rôle du père et du beau-père. Seul en effet l’enfant qui n’a jamais quitté l’unité de production et de consommation de son père est susceptible de recevoir une « femme du fils » (dyafɔlɔ tyewi). Il la reçoit alors en retour de son bon comportement, lequel se traduit essentiellement par le respect que, jour après jour, il lui a témoigné en cultivant ardemment à ses côtés : « Si tu cultives pour ton père, et que ton travail lui plaît, il peut te donner une femme de sa maison : on dit “femme du fils”. À tout moment, s’il t’envoie faire une commission, tu es là ; dans son champ, tu es là. Il rassemble les gens de sa maison et il dit : “Votre enfant-là, il travaille bien, je veux que vous lui donniez l’enfant d’Untel”. » Le don du père n’est pas seulement une marque de reconnaissance envers son fils. Il est également motivé par le désir de voir naître de cette union un enfant sur lequel, en tant qu’aîné utérin, il aura autorité. Albert Kientz (1979b : 18) souligne ainsi à juste titre que l’union de type « femme du fils » constitue « un cas exemplaire d’échange restreint » et est valorisé comme tel. Les Tyebara donnent cependant une autre dimension à la valorisation de ce type d’union. Si le père s’attend à recevoir un enfant en échange de la nièce qu’il a donnée à son fils, il s’attend également à ce que cet enfant soit aussi vaillant que ce fils qui aujourd’hui mérite sa nièce : « Le père n’a confiance en personne, c’est pourquoi il attrape une femme pour te la donner et te dit de



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