La 132 by Unknown

La 132 by Unknown

Auteur:Unknown
La langue: eng
Format: epub
Éditeur: Andara
Publié: 2013-01-01T05:00:00+00:00


Ça faisait au moins dix minutes qu’ils avaient pris la direction de Sainte-Blandine. Justine ne décrochait pas ses yeux de la route. Sa respiration était presque redevenue normale. Elle sentait, à ce moment précis, que ce manège était plus puissant que n’importe quelle autre tentative d’évasion. Les deux kidnappeurs étaient calmes et silencieux. Justine commença à se dire que s’ils ne lui avaient pas bandé les yeux et qu’ils la laissaient voir là où ils allaient, ça voulait peut-être dire qu’il n’y aurait pas de retour pour elle. L’angoisse gonfla à nouveau. Son cœur battait rapidement. Et sur un panneau qu’ils venaient de passer en quittant la 232 pour un rang de campagne, elle avait pu lire « Portes de l’Enfer ». C’était peut-être encore un signe. Elle frémit un peu, mais rien ne paraissait sur son visage. À part, peut-être, la froideur. Une zen froideur. Et puis, que pouvait-elle faire ? Au moindre mouvement, il l’agripperait. Elle ne pouvait tout de même pas sauter de la voiture. De toute façon, la porte était barrée. Et si elle le pouvait ? Ensuite, que ferait-elle ? Aucune voiture en vue, ni devant ni derrière. Aucune possibilité de courir sans se faire rattraper. Elle n’avait pas d’autre choix et il valait mieux ne pas brusquer les choses. Sa tactique du silence semblait rendre mal à l’aise son ravisseur, qui commençait à se tortiller sur son banc. Il soupirait bruyamment, se grattant frénétiquement un bouton au-dessus de la lèvre supérieure jusqu’à ce qu’il arrache la croûte et que le sang coule. Justine trouvait ça dégoûtant. Mais plus rien ne la dérangeait vraiment. À part vouloir sauver sa vie, rien d’autre ne l’intéressait maintenant. Son kidnappeur regarda sa main tachée de sang frais.

— Fuck !

Après quelques minutes dans le rang, le véhicule venait de bifurquer sur un petit chemin de terre étroit à droite. Les branches frottaient souvent sur la Mazda 5. L’homme à côté de Justine était impatient. Ou nerveux. Ou stressé. Justine n’arrivait pas à saisir parfaitement. Elle le fixait, désormais. Lui, sentant la pression de son regard, se tourna brusquement vers elle en hurlant.

— QUOI ?

— ...

— Hein ? Hein ? Madame Sainte-Nitouche muette ? Quoi ?

— Tu veux-tu un kleenex ?

Justine ne devait pas le provoquer davantage avec son mutisme. Sa nervosité pouvait basculer dans la violence. Elle sentait que la ligne était mince entre les deux. Mais elle n’avait pas pu s’empêcher d’être un peu arrogante.

— Laisse faire ! répondit-il en léchant avec sa langue le sang qui coulait sur sa lèvre tout en la narguant du regard.

Aucune réaction sur le visage de Justine. Un visage froid. Impassible. Stoïque. Mort. Après un bout dans le chemin étroit et sombre même en plein avant-midi, une petite éclaircie apparut. Un petit terrain déboisé portait en son centre une cabane qui semblait abandonnée. En l’observant, Justine sentit un froid intense dans son dos. Son kidnappeur, lui, fixait le sol, comme si lui-même appréhendait l’arrivée. La voiture s’immobilisa. Bébé regarda longuement son mec dans le rétroviseur central.



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