La prise de Makalé by Camilleri Andrea

La prise de Makalé by Camilleri Andrea

Auteur:Camilleri, Andrea [Camilleri, Andrea]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman, Histoire
Éditeur: Fayard
Publié: 2006-02-28T23:00:00+00:00


Le cinéma Mezzano projetait trois fois par jour le même film. Les retraités et les vieux allaient à la séance de quatre heures et demie, les ados et les mioches à celle de six heures et demie et les familles au grand complet ou seulement les grandes personnes à celle de huit heures et demie. Ce jour-là, comme le film de Tom Mix, était déjà passé la semaine précédente, dans la salle, il y avait une dizaine de spectateurs à tout casser. Michilino alla s’installer dans une des dernières rangées, où il n’y avait personne. Il ne pouvait pas s’asseoir près de l’écran, il s’en était aperçu le jour où il y était allé avec ses parents. Pendant qu’il regardait le film, après un petit moment, ses yeux avaient commencé à clignoter. Plus il s’asseyait au fond, mieux c’était. Avant le film, ils projetèrent le cinegiornale Luce, où l’on voyait la guerre en Abyssinie, des soldats italiens qui saluaient les avions Caprin, qui planaient au-dessus de leur tête pour les protéger, des Abyssins en fuite et une centaine de nègres fait prisonniers. À la fin des actualités, la lumière s’alluma. Un type, qui vendait des boissons gazeuses, des chocolats, des bonbons ainsi que des calia et simenza, graines de melon et pois chiches grillés, passa entre les rangées.

Michilino ne s’acheta rien. Il avait deux pièces d’une lire dans la poche, mais il préférait les économiser et les mettre avec les autres dans sa tire-lire où, au minimum, il y avait déjà cinq lires. La lumière s’éteignit et le film commença. Au premier rang, deux gamins se mirent aussitôt à se chamailler, ils commencèrent par s’insulter, puis ils s’empoignèrent et échangèrent des coups de poings. Pas moyen de comprendre le début du film. Finalement, M. Mezzano arriva en courant, sépara les deux gosses et les fit sortir de la salle à coups de pompes dans le train. Quelques minutes plus tard, un type vint s’asseoir à côté de Michilino. Pendant toute la première partie du film, il ne fit que fumer cigarette sur cigarette. Au moment de l’entracte, l’homme regarda Michilino et Michilino le regarda.

« Je m’appelle Galluzzo. »

C’était le type dont lui avait parlé Toto’ Prestipino, un quadragénaire gras, la face glabre et la peau moite de sueur.

« Vous êtes le comptable ?

— Oui. On t’a parlé de moi, à ce que je vois ! Tu veux quelque chose ? lui demanda l’homme, en faisant signe au vendeur.

— Non, merci », fit Michilino.

Le comptable s’acheta une limonade, fit basculer la petite boule qui servait de bouchon, s’enfila la bouteille et, lorsque le film reprit, la posa par terre. Il s’alluma aussitôt une cigarette. Peu après, il se pencha vers Michilino et lui chuchota dans l’oreille :

« Tu veux me faire plaisir ?

— Oui.

— Tu peux poser ton fusil sur le fauteuil à côté de toi ?

— Oui », dit Michilino, même s’il ne comprenait pas en quoi son mousqueton pouvait bien déranger le comptable, vu qu’il le tenait la crosse par terre et le canon serré entre les cuisses.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.