La Marche du Prophète by Gabriel Katz

Auteur:Gabriel Katz [Katz, Gabriel]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

27

Une fois de plus, l’énorme campement d’Ochin semblait sortir de terre. Il fallut moins d’une heure à ces nomades aguerris pour planter les tentes, aménager les bivouacs, décharger les chariots et nourrir les bêtes. Le métier rentrait. On avait monté l’enclos pour les chèvres, installé sous un auvent la table du recruteur et planté la figurine d’Ochin bien haut au-dessus de la tente du Prophète. Les prêtres s’affairaient, papillonnant d’un endroit à l’autre. Des milliers d’anonymes déroulaient leurs couvertures. Et l’inévitable encensoir, chargé de braises à peine sorties des flammes, répandait déjà son nuage de parfums et d’épices.

– Cette fois, c’est la bonne, observa Annoa d’un ton pensif. La marche du Prophète s’achève ici.

– On ne bouge plus ? demanda Leth Marek, qui surveillait, bras croisés, le déploiement des gardes.

– Non, c’est la dernière étape. Ridan est une base idéale pour nous : la cité n’est plus qu’à deux heures de marche, nous sommes sous la protection du baron… C’est d’ici que se jouera la dernière partie.

– Ça passe ou ça casse, en somme.

– Exactement. Soit le culte se répand à Kyrenia et nous aurons gagné, soit ils trouveront quelque chose pour nous arrêter, et ce sera la fin.

Côte à côte, le colosse et l’intendant regardaient s’agiter la fourmilière.

– Je te laisse sécuriser le camp, champion. Je vais aller présenter mes respects au seigneur de Ridan.

À peine Annoa se fut-il fondu dans la foule que Desmeon apparut, hilare, flanqué de deux gardes qu’il congédia – toujours modeste – d’un claquement de doigts autoritaire. Pendant le début de l’installation, il s’était longuement entretenu avec le capitaine de la forteresse.

– T’as vu ça, chef ? s’exclama-t-il en riant. Je crois que je ne me suis pas autant marré depuis que le vaisseau amiral de la ville a coulé à trois mètres du bord le jour de son lancement.

– Ce qui est drôle pour toi n’est pas toujours drôle pour les autres, Desmeon.

– Non, crois-moi, ça va te faire rire aussi.

– Vas-y, je t’écoute.

Sans masquer son mépris, le jeune homme désigna le château, mais baissa toutefois d’un ton pour que les guetteurs qui patrouillaient sur le chemin de ronde ne puissent pas l’entendre.

– Devine combien ils sont.

– Les gardes de Ridan ?

– Les gardes, le guet, les soldats, les officiers, les capitaines d’armes, les archers… Donne un chiffre.

– Je ne sais pas, quatre-vingts ? Soixante-dix ?

Le chiffre était dérisoire pour une baronnie des Communes, mais si Desmeon ricanait, ce n’était sans doute pas pour rien.

– Vingt-quatre.

– Non !

– Je te jure, ils sont vingt-quatre, tout compris, avec leur

capitaine. C’est d’ailleurs les seuls à avoir besoin d’un capitaine d’armes pour vingt-quatre hommes ! J’ai pas osé demander combien ils avaient de sergents.

Leth Marek secoua la tête, incrédule. Vingt hommes d’armes, c’était l’escorte d’une grosse caravane de marchands. Il leva les yeux sur les remparts et compta à peine trois archers sur le chemin de ronde, dont un qui s’endormait presque.

– Mais pas de panique, reprit Desmeon. Le baron met aussi sa belle-mère à

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