LA FABRICATION DE L'ENNEMI by PIERRE CONESA

LA FABRICATION DE L'ENNEMI by PIERRE CONESA

Auteur:PIERRE CONESA [CONESA, PIERRE]
La langue: fra
Format: epub
Tags: General Fiction
Éditeur: ROBERT LAFFONT
Publié: 2011-08-18T22:00:00+00:00


Le culte de la violence

Même en temps de paix, les manifestations publiques violentes deviennent une sorte de rituel de passage pour les jeunes gens formés dans le culte du souvenir et de la pseudo-répression. Certains événements de substitution cristallisent la phase préguerrière comme des combats entre supporters, sortes de règlements de comptes symboliques autour des matchs de football entre équipes serbes et croates. L'implication graduelle de plus en plus forte des jeunes à travers le réseau de soutien aux « combattants », la fourniture de caches et le portage de « valises » mènent progressivement à l'action violente. Au Pays basque, la kale borroka (violence urbaine contre des guichets bancaires, du mobilier urbain, des vitrines, incendies de conteneurs à ordures...) des groupes radicaux proches de l'ETA est devenue un rituel pour les jeunes etarras. Selon une étude présentée en novembre 2009, sur la « transmission des valeurs aux mineurs84 » faite par le médiateur Inigo Lamarca sur un échantillon de 1 829 enfants de douze à seize ans, 30 % de ceux-ci se refusent à condamner le terrorisme, 15 % le trouvent justifié et pour 12 % les actions de l'ETA sont bonnes pour l'Euskadi. Le rapport remarque que c'est la famille qui diffuse cette culture et souvent la mère plus que le père. Depuis plus de quarante ans, le phénomène terroriste lié à des positions nationalistes extrémistes de l'ETA a causé plus de 1 000 morts, presque 7 000 blessés, d'innombrables dégâts matériels et d'immenses souffrances à la population, alors que la région, une des plus riches d'Espagne, jouit de son autonomie, de sa police et de sa langue.

La violence sociale devient peu à peu une violence guerrière. Le monopole étatique de la force du pouvoir central se délite et est remplacé par des milices. L'État central est contesté par tous. L'armée nationale yougoslave se décompose après l'indépendance slovène. Au Liban, les manifestations lors de la mort de Nasser en 1971 font prendre conscience de la multiplicité des armes qui circulent et les chrétiens commencent à s'organiser en milices armées pour une guerre qui ne débutera que deux ans plus tard. George Corm estime qu'au Liban, avant même la guerre civile, les différentes milices mobilisaient environ 10 000 personnes (0,3 % de la population), alors que l'armée libanaise ne comptait que 5 000 hommes. Les milices prétendent prendre en charge la défense de leur ethnie. « Les Serbes de Croatie appellent à l'aide ! » annonce la milice d'Arkan, l'un des pires chefs de guerre serbe. C'est l'indicateur le plus significatif de la marche vers la violence. Dès lors, la stratégie de chacun va tendre vers l'épuration ethnique par l'interdit, la peur ou le massacre « préemptif ». Le lumpenprolétariat s'identifie à ce discours populiste contre une victime proche et constitue la force de frappe de ces milices aux noms fleuris : les Tigres d'Arkan, les Scorpions serbes, les Interahamwe (« ceux qui sont ensemble ») du Rwanda, les milices MAS, Muerte a los secuestradores, et les groupes paramilitaires en Colombie, les groupes Mai Mai du Congo ou les cavaliers Janjawid du Soudan.



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