La dernière ombre by Paul Doherty

La dernière ombre by Paul Doherty

Auteur:Paul Doherty [Doherty, Paul]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier Historique
Éditeur: 10/18
Publié: 2022-06-15T09:43:38+00:00


Quatrième partie

« Tout en bas de l’échelle de la Garduna, il y avait les “boucs”. »

Adossée au mur du réfectoire, Katarina Fitzherbert ne pouvait que suivre avec effroi la scène qui se déroulait sous ses yeux. Toute la communauté de l’abbaye, moines, frères lais, domestiques, ainsi que les faibles et les malades que l’on avait tirés de leur lit de l’infirmerie, avaient dû se rassembler là. Katarina posa les yeux sur le jeune Henri, qui se tenait parmi les garçons de cuisine, les valets d’écurie et les petits factotums. Il était sale et peu soigné, tout comme Jasper, visage et crâne glabres, qui se mêlait au groupe des frères lais. Tous les yeux restaient rivés sur la sinistre silhouette qui arpentait la vaste salle, enveloppée de noir de la tête aux pieds. L’ombre effrayante s’arrêtait par moments, comme absorbée dans sa réflexion, mais Katarina soupçonnait l’inconnu d’approfondir ainsi le silence pour amplifier le climat d’angoisse. Devant chaque issue, d’autres hommes en noir tout aussi menaçants montaient la garde. Comme leur chef, ils étaient harnachés pour le combat : ils tenaient une arbalète à la main et, quand leur chape s’entrouvrait, on voyait briller les clous d’un ceinturon dans lequel étaient glissées épées et dagues.

Le cauchemar avait débuté la veille vers midi, avec l’apparition à la grille de huit frères Sacs en procession funéraire, précédés d’un porteur de croix et d’un disciple tenant une lanterne. Un cortège funèbre comme on en voyait souvent arriver : pour une raison ou pour une autre, certains moines souhaitaient être inhumés dans le cimetière de l’abbaye de Chertsey, de sorte qu’à leur décès leurs frères les conduisaient jusqu’à leur dernière demeure. La procession avait donc été accueillie sans l’ombre d’une hésitation. Avec d’autres frères lais, Jasper avait dressé dans le sanctuaire des tréteaux pour poser le cercueil, qui serait veillé toute la nuit jusqu’à la première messe. Katarina avait eu vent de la présence des nouveaux venus, mais elle n’y avait prêté aucune attention. Chertsey était un lieu saint, construit sur une terre consacrée, et les Bénédictins avaient le devoir d’héberger ce type de rituels sacrés. Rien qui sortît de l’ordinaire, donc, et la communauté avait continué à vivre selon son rythme habituel.

À la tombée du jour, l’abbaye s’était préparée pour la nuit, puis on était allé se coucher. Quelques heures plus tard, le tintement strident de multiples clochettes était venu rompre le silence et l’harmonie. C’était la manière de sonner l’alarme et, selon la règle, tous les membres de la communauté devaient alors courir se rassembler dans la nef de l’abbatiale. À contrecœur, on s’était donc extirpé des lits et enveloppé dans d’épaisses chapes d’hiver pour gagner l’église. Là, contre toute attente, on avait trouvé les portes closes. Un groupe d’hommes armés, masqués et cagoulés, en gardaient toutes les entrées.

Dans le chaos qui s’était ensuivi, deux jeunes frères lais avaient cherché à fuir. On leur avait tranché la gorge sans états d’âme. Lorsqu’une voix puissante s’était élevée pour clamer un ordre, Katarina avait identifié un accent qui pouvait venir d’Espagne, de Castille ou d’Aragon.



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