Gore : La Marée purulente by Daniel Walther

Auteur:Daniel Walther [Walther, Daniel]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Fleuve Éditions
Publié: 1986-01-02T00:00:00+00:00

TROISIÈME PARTIE

LES JOURS ÉCARLATES

Jamais peste ne fut si fatale, si horrible. Son avatar, c’était le sang... la rougeur et la hideur du sang.

Edgar Allan Poe,

Le Masque de la Mort rouge.

Le lieutenant Wallach était de fort mauvaise humeur. Ses supérieurs lui avaient passé un savon, et il n’avait pas trouvé un seul argument valable pour plaider sa cause.

— Vous auriez dû faire appel à la Garde ! On vous aurait envoyé une escouade de types armés jusqu’aux dents. Vos pestiférés cannibales auraient été nettoyés en cinq minutes, lieutenant Wallach ! Au lieu de cela vous avez essayé de jouer les héros et le résultat est là : des dizaines de morts et de blessés.

— Un pompier a suggéré d’envoyer des gars avec des lance-flammes et...

— Wallach ! avait aussitôt hurlé le surintendant Leitner. Fermez votre gueule ! Si c’est pour raconter des conneries...

Puis il s’était excusé, parce que, tout de même, il y était allé un peu fort pour un homme de son rang et de son éducation.

— Il n’avait peut-être pas tort votre pompier pyromane. Des fantassins armés de lance-flammes et protégés par des combinaisons spéciales pourraient éviter que...

Parce que les monstres de la veille avaient fait des petits : aux quatre coins de la ville, on signalait des forcenés qui se ruaient sur les passants. Il y en avait même qui entraient dans les maisons et qui s’attaquaient aux dormeurs, propageant le mal, quand ils ne semaient pas la mort et la désolation.

Le lieutenant Wallach avait entendu un de ses subordonnés s’exclamer : « C’est une vraie épidémie. Une histoire de vampires ! » Maintenant le subordonné en question soignait ses nerfs dans une clinique : en rentrant chez lui, il avait trouvé sa maison envahie par d’ignobles créatures bavochantes qui s’étaient jetées sur lui et qu’il avait abattues en vidant sur elles son chargeur. Avant de succomber à une crise de nerfs, il avait aperçu, gisant sur le sol du living-room, les restes sanglants de sa femme et de ses deux fillettes. Des lambeaux de chair traînaient, patchwork effrayant, témoins d’un carnage monstrueux.

Vampirisme, épidémie ?

« L’Apocalypse, se disait Wallach. La Bête est sortie de la nuit et elle nous dévorera tous. »

Maintenant, les mains profondément enfoncées dans les poches, il regardait la pluie tomber, émoussant les contours géométriques de la ville. Tout était devenu tellement irréel. La lèpre ! Mais une forme mutante, particulièrement hideuse de cette maladie... Car il avait pris le temps de consulter quelques ouvrages et de rafraîchir sa mémoire. La lèpre n’était pas, en temps ordinaire, une maladie à ce point contagieuse, et il n’existait pas d’exemple de lépreux homicides, cherchant qui souiller, qui dévorer.

Il en avait assez. Il ne tenait plus sur ses jambes. Il rêvait de trois choses : d’une bière, d’un steak et de neuf heures d’un sommeil de plomb.

« Que les vampires aillent se faire foutre... Je rentre chez moi. Pourvu que Corinne ait pensé à moi... »

Des gouttes d’amertume coulèrent au fond de sa gorge : pourquoi avait-il commis

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