Sharon Tate ne verra pas Altamont by Marc Villard

Sharon Tate ne verra pas Altamont by Marc Villard

Auteur:Marc Villard [Villard, Marc]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature Française
Éditeur: Cohen&Cohen
Publié: 2014-05-14T22:00:00+00:00


Vendredi 5 décembre,

même jour, circuit d’Altamont

Les indiens du Flower People débarquent à Altamont. Vestes à franges, guenilles, bandanas, tatouages tribaux, gosses en bandoulière, sandales fabriquées à la main. L’été de l’amour joue les prolongations, et tout ce beau monde avance sur le circuit de Dick Carter en évitant les carcasses de stock-cars éventrées, les pneus pourrissants. Les plus impatients commencent à baiser sous des couvertures crasseuses ou tirent comme des dingues sur des spliffs de marijuana. Le LSD viendra plus tard. Les guitares sortent des étuis et les braseros commencent à fleurir. Ils sont la jeunesse du monde, la musique est amour, Altamont est amour, et vers 3 heures du matin ils devinent Mick Jagger sous une capeline rose en vadrouille parmi la foule endormie. Lui aussi est amour. Keith Richards, qui ne refuse jamais de la came gratuite et des filles au même prix, décide de passer la nuit au sein du campement.

Le samedi matin, ils sont 100 000 à se presser autour d’une scène minuscule qui mesure moins d’un mètre de hauteur. Les voitures sont abandonnées à une dizaine de kilomètres du circuit. Deux hommes, les frères Maysles, dirigent une équipe de tournage qui capte des scènes de groupe, des seins nus, des bouddhistes en lévitation et des mecs qui pensent qu’ils sont à nouveau rendus à Woodstock.

Sur le coup de 10 heures du matin, les Hell’s Angels arrivent eux aussi avec l’arsenal habituel : cannes de billard lestées, poignards, chaînes. Les Angels de Frisco sont compressés dans un bus jaune bourré à craquer de cames les plus diverses et de bière, que l’organisation des Stones rachètera. Les Angels dérangent les enfants de l’amour qui viennent de s’installer, et descendent de moto pour distribuer quelques baffes, histoire que chacun sache qu’ils sont le putain de service d’ordre.

La lumière de l’hiver est grise, et un vent froid se glisse à hauteur des jambes. Ils sont maintenant 300 000, aucun point d’évacuation n’est prévu, les sanitaires sont rachitiques et des queues inouïes se forment devant leurs portes. Les premières overdoses commencent également à retenir l’attention des toubibs sur place. Bref, au centre de ce foutoir, Sam Cutler, le tourneur, monte sur scène et annonce : « Mesdames et messieurs, voici maintenant Santana, le premier groupe de la plus chouette réunion de 1969. »

Pendant que Carlos se penche sur sa guitare et envisage d’enflammer les lieux, le public se réveille pour de bon et commence à rouler du popotin sur la scansion du rock latino. Les Angels sont répartis en plusieurs endroits et notamment autour du bus jaune. Des boîtes de bière jaillissent en direction de la scène sous l’œil goguenard du service d’ordre. Celui-ci a d’ailleurs pris position devant et autour du plateau, cannes de billard en sautoir. Certains spectateurs indélicats s’avancent trop près et disparaissent sous les coups de bottes des Angels. Il s’agit d’une mise en train, on l’aura compris. L’hélicoptère des Stones n’est pas encore arrivé quand Jefferson Airplane s’installe sur l’estrade.

Grace Slick, dans une robe bleue moulante, démarre sur We



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