Sandrine et Sylvie by Arsinoé Leszczynska

Auteur:Arsinoé Leszczynska [Leszczynska, Arsinoé]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Erotique
Éditeur: Atramenta
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Jusqu’à alors, mes seules références en allemand dataient de La Grande Vadrouille que quand j’étais enfant, on m’autorisait à regarder quand il n’y avait pas classe le lendemain ; aussi l’associais-je spontanément aux vociférations de la soldatesque. Avec une patience d’ange, Sophie entreprit de saper cet a priori pour faire de moi une locutrice honorable, au moins pour les quelques lignes que j’aurais à déclamer. Elle me fit partager son amour de cette langue, par exemple au travers de son attirance pour la syllabe g-e qui en allemand se prononce entre un gue et un gué français ; elle insista sur les mots genau, gegangen et gemütlich qu’elle me fit répéter je ne sais combien de fois sur des intonations différentes. Je me souviens que pendant que je m’exécutais ses yeux restaient rivés sur mes lèvres et ma gorge et qu’au terme de la série elle s’était penchée vers moi pour m’embrasser. C’était la première fois que ma soumise prenait une telle initiative.

Se présenta ensuite une autre embûche : nous nous étions aperçues que les intermèdes pendant lesquels je prenais la parole n’étaient pas suffisamment longs pour qu’Hélène et Sophie aient le temps de changer de pose. Il fallait absolument que le projecteur reste braqué sur moi plus longtemps ; pour autant on ne pouvait pas allonger mon texte, d’une part parce que je n’étais pas à ce point à l’aise avec la langue de Goethe, et d’autre part parce que le spectacle serait devenu un peu trop culturel, et donc potentiellement ennuyeux.

— Pas grave, dit un jour notre chère sponsor Laetitia. Sylvie va tout simplement faire diversion.

— Comment ça diversion ? m’étonnai-je.

— Le latex. Ça te dit quelque chose ?

— Ben… oui et non.

— Une belle combinaison. Noire et brillante comme du pétrole. Il paraît que les allemands en sont fous.

— Et alors ?

— Eh bien j’en suis sûre : si tu portais le modèle Barbara de notre catalogue, il te suffirait de faire quelques manières pour capter l’attention du public et gagner de précieuses secondes. En plus nous mettrions un micro hypersensible pour capter les grincements. Il paraît que ça a un effet hypnotisant.

— À supposer que ça m’aille…

— Pas de fausse modestie s’il te plaît. J’aime assez ton mélange perso : musculeuse avec des hanches maternelles. Nous allons faire de toi une catwoman par qui les spectateurs auront envie de se faire lacérer.

— Avec des semelles à plateau, précisa Agathe. Deux centimètres pour que ça reste élégant, mais avec des talons vernis de quinze centimètres. Imagine : presque la taille d’Hélène quand elle est pieds nus.

— Euh… un instant les filles. La vedette sur scène c’est pas moi. Il ne faudrait pas que…

— Je trouve que l’idée est excellente, intervint notre walkyrie qui s’était tue jusqu’alors. Tu n’as pas à avoir peur de me faire de l’ombre puisque c’est mon nom qui figure sur la fiche du jury.

— Et du même coup on règle la question de ton costume de scène, appuya Agathe.

Je m’étais alors tournée vers Sophie qui du bout de son minois grêlé de tâches de rousseur, avait discrètement acquiescé.

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