Dans l'ombre des Beatles by Derek Taylor

Auteur:Derek Taylor [Taylor, Derek]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Musique, Document, Récit - Témoignage
ISBN: 9782743648626
Éditeur: Rivages Rouge
Publié: 2019-09-30T22:00:00+00:00

Lorsque Allen Klein se présenta chez Apple, il avait en face de lui ceux qui le craignaient et ceux qui ne le craignaient pas. Sans parler de ceux qui ne lui accordaient aucune pensée : cuisiniers, femmes de ménage, garçons de bureau, archivistes, dames chargées d’apporter le thé. Bref, tous les gens essentiels au fonctionnement d’une entreprise. Des gens qui sont moins bien payés que les autres, mais dont l’absence a des effets désastreux et immédiats sur le moral des personnels fort bien rémunérés, musicos ou businessmen (dont l’absence, par contre, s’avère souvent bénéfique à la marche de la boîte qu’ils sont censés faire tourner).

J’étais très excité lorsque Klein arriva à Londres et s’installa au Dorchester avec ses anges gardiens virils et bourrus. Gros changement, par rapport aux pisse-vinaigre qui avaient proposé de nous trier. Klein vint me voir et m’assura que tout allait être « génial ». Génial était un mot génial, à l’époque. Génial.

Klein affirma qu’il ne comptait rien bousculer. Il voulait juste réarranger. Je n’avais donc pas peur : s’il s’agissait d’un simple réarrangement, je ne me trouverais pas sur la ligne de tir. Car je me réarrangeais moi-même tous les jours. Ce que je ne voulais pas, c’était qu’on me bouscule. Qui a besoin de ça ?

Et puis les licenciements commencèrent. Nous en avions déjà beaucoup parlé. Paul avait mis le sujet sur la table peu après la création d’Apple. Ce ne fut pas une fois, ni deux, mais bien deux fois cent fois que nous fûmes priés, Neil et à moi, de lister les gens qui devaient partir et ceux qui pouvaient rester. Nous n’avons jamais obéi. Paul non plus. Eichmann y serait peut-être arrivé, mais il était mort. Ou le Dr Mengele, mais il était au Paraguay. La force de Klein, c’est qu’il n’avait besoin d’aucune liste, vieux. Il lui fallait seulement des chiffres. Ça lui suffisait pour commencer à nous rationnaliser.

De temps en temps, Klein m’arrêtait dans l’escalier. Il disait : « J’ai jeté un coup d’œil aux chiffres des dix dernières années. Ces quatre gars se sont fait flouer. » Ma réponse était toujours la même : « Par moi ?

– Non, rétorquait Klein. Ton service n’est pas mauvais du tout. » Et puis, les locataires du deuxième étage ne coûtaient pas cher. C’était vrai. Nous n’avions ni voitures de location, ni notes de frais pour des nuits d’hôtel ou des soirées en club. L’équipe était formidable. Bien fournie. Que des gentils. Il y avait Mavis. Elle avait travaillé pour Leslie Perrin – Leslie qui assure maintenant les relations publiques de John, George et Ringo, d’Apple, des Stones, de Sinatra, de Lulu3 et de douzaines d’autres. Leslie est un gars bien. Il dit qu’il ne filoute jamais le personnel ni les clients. Comme je dis que je n’arnaque jamais le personnel ni les clients, j’ose affirmer que ni Leslie ni moi n’arnaquons qui que ce soit. Mavis est la femme d’Alan Smith. Il bossait au Birkenhead News quand j’étais moi-même au Hoylake News, dans le lointain Cheshire.

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