Ces années-là by Klopmann André;

Ces années-là by Klopmann André;

Auteur:Klopmann, André;
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Éditions Slatkine
Publié: 2016-04-14T16:00:00+00:00


Blouson noir

Chat musculeux d’arrière-cour, ce Bernard un peu ermite rôde de préférence la nuit. Il chasse les souris, mais pas seulement. Il course aussi les importuns qui tentent de percer le personnage forcé qu’il promène sur les scènes françaises.

Soir d’automne dans un bar. Bernard est là qui exhibe son blouson noir, l’œil pareil. Sa dégaine de baroudeur chaloupe dans l’antre de la bourgeoisie d’une ville riche. Le Griffin’s est vide, mais Bernard est plein. Il tangue et peine à trouver ses marques. Le rebelle, l’anar fraiera peut-être avec une héritière ou une executive woman qui se donnera quelques frissons d’un soir pressée contre sa belle carlingue.

Boucle d’oreille et goût du large, il joue à Corto Maltese en version balèze, travaillée à la fonte en salle plutôt qu’à l’enrouleur en mer. Il est à Recife quand on l’attend à Saint-Malo, et dans les nuages souvent, beaucoup. L’influence des Doors peut-être.

Soir de concert à Lyon. La tournée va le mener à Saint-Etienne, sa ville natale. Maire communiste, comme Bernard. L’enfant prodige revient. Mais Nanar déprimé veut partir. Partir au loin, sur les routes. Ne plus faire ce métier. Ne plus être chanteur. Rompre le cycle infernal des obligations, dit-il. Alors il prend un engagement.

– C’est ma dernière tournée.

– Fini, les copains ?

– Je dis que je ne chanterai plus.

Bernard y croit durant trente secondes. Bernard raconte, plagie, invente, mythifie et arrange son autobiographie. Le révolté, le baroudeur, l’insoumis est enfant d’une classe ouvrière moyenne sans histoire. A Saint-Etienne, ses contemporains connaissent Bernard Oulion et savent le récit de sa vie tout enluminé. Ailleurs on l’appelle Lavilliers, et d’aucuns lui vouent un culte.

Autre soir de concert, sur le plateau d’un festival. En coulisses, quelqu’un vole son blouson de cuir. La relique du héros. Moche. Sorti de scène, Lavilliers devient fou. Engueule tout le monde. Accuse les techniciens, les journalistes, la terre entière. Elucubre, menace et téléphone régulièrement encore à la télé durant un an.

– J’ai des amis au Mossad, ça va chauffer !

J’ignorais le Mossad préoccupé de vols de blousons, mais beaucoup savent le bonhomme assez complexe.

Comme le scorpion mon frère.

Nazim Hikmet.

Comme la bouche d’un volcan éteint.



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