Stravaganza 1 La Cite des Masques by Mary Hoffman

Auteur:Mary Hoffman [Hoffman, Mary]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantastique
Publié: 2017-06-22T22:00:00+00:00

Les parents de Lucien persistèrent à se comporter de manière mystérieuse. Avant de partir au travail, son père lui adressa un clin d’œil lorsqu’il l’embrassa en lui disant : « A ce soir. » Ces paroles et le baiser étaient habituels, pas le clin d’œil. Sa mère avait des cours presque toute la journée, mais au petit déjeuner, elle le prévint :

— Je vais être très occupée aujourd’hui, Lucien, mais ce soir, au dîner, on aura le temps de parler.

Parler de quoi ? se demandait Lucien.

L’idée de devoir se débrouiller seul du matin au soir ne le gênait pas, au contraire. Il avait besoin de réfléchir et de se reposer. Pourtant, même si sa mère était absente la journée entière, il n’était pas tenté de retourner à Bellezza pour voir ce qui se passait là-bas la nuit.

Ses visites nocturnes dans la cité commençaient à le mettre mal à l’aise. La situation paraissait de plus en plus dangereuse. C’était uniquement grâce à la chance et à l’élément de surprise qu’il avait pu jouer les héros en contrecarrant une tentative d’assassinat, au lieu de se retrouver dans la peau de la victime. Il ne pouvait s’empêcher de se demander ce qui serait advenu à son corps, ici dans son monde, si on l’avait poignardé à Bellezza. En entrant dans sa chambre, son père ou sa mère l’auraient-ils découvert mort, dans des draps ensanglantés ?

Ses pensées devenaient macabres. Et si la police avait organisé une chasse à l’homme à Londres ? Ils n’auraient jamais retrouvé le meurtrier, bien sûr, et lui serait rentré dans les statistiques en rejoignant les nombreux meurtres jamais élucidés. Autre interrogation : que serait-il arrivé à son corps, là-bas à Bellezza ? Aurait-il disparu, tout simplement ? Si le meurtrier avait réussi son coup, quelqu’un aurait-il su que Lucien était mort en voulant protéger la Duchessa ?

Comme il ne pouvait répondre à aucune de ces questions, Lucien sombra dans un profond sommeil jusqu’à l’heure du déjeuner, en rêvant d’un procès au cours duquel l’assassin bellezzan, debout dans un box du XXIe siècle et brandissant toujours son poignard en os de merlino, déclarait : « Vous ne pouvez pas prouver que je l’ai tué puisque vous n’avez pas le corps. » Le poignard rouge de sang dégoulinait sur le plancher de la salle de tribunal, et, dans son rêve, Lucien savait que ce sang était le sien.

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