Que ferais-tu si la vie te donnait une seconde chance ? by Julien Aime

Que ferais-tu si la vie te donnait une seconde chance ? by Julien Aime

Auteur:Julien Aime [Aime, Julien]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Amour, Romance, Littérature française
Éditeur: Librinova
Publié: 2019-06-20T22:00:00+00:00


27.

— Maman !

Je ne peux retenir mes larmes au moment où le corps minuscule de ma mère apparait dans l’encadrement de la porte. Son visage est méconnaissable, la chirurgie s’est trop amusée de ses chairs fatiguées, mais son regard est toujours le même, vert et perçant.

Je la prends dans mes bras, j’ai l’impression de serrer un sac d’os sous ses vêtements, elle est encore plus maigre qu’avant.

— Mais qu’est-ce que tu as ? Qu’est-ce que tu fais là ?

— Je suis tellement content de te voir !

— Qu’est-ce qu’il se passe ?

Elle me dévisage sans comprendre cette effusion de joie et ces sanglots.

— Je peux entrer ?

— Oui, oui bien sûr ! dit-elle en refermant derrière moi, après avoir jeté un dernier regard dans le couloir, espérant sans doute voir débouler sa belle-fille qu’elle adore ou ses petits-enfants.

En entrant dans l’appartement, je constate que pratiquement rien n’a changé depuis ma dernière visite. En 2018. Dix ans plus tard, tout est à sa place, comme dans mes souvenirs. Le papier peint au charme désuet a certes quelque peu jauni, le parquet en chêne craque un peu plus qu’avant, mais il se dégage toujours cette même douceur accueillante, bienveillante qui m’y retint jusqu’à vingt-trois ans. En passant devant le miroir du salon, je suis presque surpris de ne pas y voir le Thomas d’alors.

— Que fais-tu là ? Tu aurais pu prévenir !

Sur la table basse fume une tasse de thé, posée à côté d’un vieux livre. Le mouvement de balancier du rocking chair qui appartenait à mon grand-père s’éteint doucement. Je reste immobile un instant, m’imprégnant de cette atmosphère familière, rassurante, qui éveille en moi une sorte de mémoire ancestrale, et qui me dit que si rien n’a changé ici, tout n’est peut-être pas perdu, je peux peut-être encore espérer revenir en arrière et quitter ce futur qui n’est pas le mien.

— Tu veux quelque chose ? Un café ?

— Oui, un café, très bien.

Je détourne les yeux, je ne parviens pas à m’habituer à son nouveau visage. Je passe la main sur l’armoire normande centenaire, mes doigts jouent avec les dessins sculptés à même le bois. Je prends un livre dans la bibliothèque, sa couverture en cuir est douce contre ma peau, il sent le papier vieilli, ce mélange de café et de chocolat que j’aime tant, une odeur apaisante qui fait voyager dans l’espace et le temps.

Le pas trainant de ma mère me fait me retourner. Elle est voûtée, fatiguée, et la pensée d’avoir perdu dix ans de sa vie m’accable soudain, et j’ai à nouveau envie de pleurer. Combien d’années lui reste-t-il ?

— Tiens, me dit-elle en me tendant le mug de Noël qu’adolescent, j’avais ramené d’un voyage linguistique en Allemagne. Je le regarde troublé. C’est fou comme un objet aussi insignifiant peut d’un seul coup se charger de valeur et de sentiments. C’était à Essen, au centre de la Ruhr. Essen, ça veut dire manger en allemand. Je m’en souviens très bien parce que j’avais détesté les ragoûts que me servait tous les soirs la grosse Bertha aux cheveux rouges qui me servait d’hôte.



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