Paris insolite by Jean-Paul Clébert

Paris insolite by Jean-Paul Clébert

Auteur:Jean-Paul Clébert [Clébert, Jean-Paul]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Documents - Essais
Éditeur: Denoël 1955, Atelier Panik éd. numérique
Publié: 2012-08-17T22:00:00+00:00


5. Nuits de Paris…

Cependant, malgré la quantité appréciable de caches propres à un sommeil rapide mais réparateur, il arrive au vagabond malin de coucher dehors, parce que se trouvant trop loin de l’une d’elles, stoppé par des pieds douloureux, des godasses blessantes, des reins lourds, ou par le froid, ou par la pluie, ou la simple envie de passer la nuit à la belle étoile dans un quartier peu connu, ou le plus souvent désemparé, désorienté, par une biture ardente, qui laisse le réfléchissoir indécis et rend les gestes mous, toutes raisons bonnes ou mauvaises pour parer au plus pressé, découvrir un coin abrité où se lasser, se pelotonner, attendre le jour, voir venir…

Nuits de Paris.Nuits passées dans les cabanes de la voirie, sur la voie publique, le long des murs d’usine ou des fossés de canalisation, dans ces bicoques en bois solide munies d’un confort certain (appréciable pour moi et relatif pour l’ouvrier) ou sous les simples bâches de toile verte tendues sur un jeu de poutres… Et malgré la pénétrante odeur de gaz carbonique qui émane invinciblement des travaux en cours, je passais des heures heureuses, à dormir vite, selon l’expression juste d’un collègue qui affirmait dormir plus que moi dans le même temps…Un soir que le froid m’avait chassé des berges de la Seine et que je n’avais pu trouver de place à la péniche du pont d’Austerlitz, il était bien trop tard, je me décidai à remonter sur le boulevard et à marcher jusqu’au petit jour, mais de l’autre côté des bâtiments puants de la Douane, j’aperçus un feu brûlant dans la rue Sauvage entre les rails du train qui tourne à cet endroit et quitte le quai pour rejoindre le réseau de la gare aux marchandises, et m’approchant je vis une tente de gardiens de travaux, en soulevai un coin, mais ne trouvai personne dedans. Je restai un bon moment assis sur un rail les jambes écartées, les mains au-dessus du feu, bénissant ce nouveau miracle, entretins les flammèches avec du bois tout préparé et entassé à portée, en profitai pour sécher mon mouchoir qui en avait besoin, roulai une série de cigarettes et roupillai doucement. Au bout d’une petite heure, le gars s’aboula avec un litre neuf, me considéra un instant puis me fit entrer chez lui.Sous la bâche il y avait en plus du lit de camp, une longue caisse à outils sur laquelle je me prélassai. Le type, un vieux rouquin qui bavotait, m’offrit à boire, et l’on se mit à picoler à la régalade. Et quand je lui eus, pour les besoins de la cause, raconté quelques tranches de ma vie, il sortit de sa musette un reste de fromage, un quignon de pain et me fit réchauffer du café. Puis il me parla de ses rêves déchus, il aurait désiré devenir garde-barrière ou chef de gare de train vicinal dans son pays, le Rouergue ou le Quercy, je ne me souviens plus, mais n’avait pas « fait assez d’instruction »



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