Notaire en eaux troubles by Alain Gandy

Auteur:Alain Gandy [Gandy, Alain]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
ISBN: 9782258080065
Éditeur: Presses de la Cité
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Cette fois-ci, il n’était pas besoin de traduction, mais il paraissait évident que les instances dirigeantes de l’école, malgré l’opinion sévère des Américains, souhaitaient trouver pour mademoiselle Breustein une sanction plus clémente que l’exclusion. Battioli, qui avait commencé par s’insurger contre le féminisme à rebours des Sciences Po, approuva le deuxième paragraphe.

— J’espère que ce petit salopard va blanchir au maximum sa compagne. Si elle est coupable, c’est seulement de s’être prêtée à cette manœuvre d’intoxication, destinée à justifier son retour en France.

Combes se contenta de sourire, et s’en remit au juge pour prononcer la sentence.

— Nous ne sommes pas plus avancés, regretta Massac. Je vous interdis à tous les deux de signaler au suspect la teneur de cette réponse de son école. Mais je voudrais quand même avoir l’adresse actuelle de cette Nathalie et sa photo. Vous qui connaissez des tas de gens à Paris, dit-il en se tournant vers Joseph, ne pourriez-vous pas vous renseigner ?

— Il se trouve, dit Combes, qu’au cours de mon enquête sur l’accident du car de Belcastel2, j’ai beaucoup apprécié le coup de main du commissaire du VIe arrondissement. S’il est toujours en fonction, je lui demanderai de joindre ce que vous demandez aux documents intéressant la commission rogatoire qu’il a reçue.

Au retour de ce coup d’épée dans l’eau dans le bureau du juge, Joseph, qui s’imaginait couver une mauvaise grippe, avait fait l’effort de remonter la rue de la République d’une centaine de mètres, jusqu’à la Maison de la Presse, dont les vitrines colorées et toujours modifiées exerçaient sur lui une sorte de fascination incompréhensible de la part d’un homme qui prétendait se méfier de tout ce qu’écrivaient journalistes, éditorialistes ou échotiers. Il s’arrêta sur le pavé, frissonnant sous l’autan aigre de mauvais augure, se demandant comme chaque fois quel titre il pourrait bien choisir qui entretienne sa mauvaise humeur. Comme chaque fois, de derrière sa vitrine, Barthes, qu’il appelait « le vendeur de papier », lui fit un signe d’appel de la main. Le vent semblait traverser sa vieille canadienne. Joseph entra et se soumit au cérémonial habituel :

— Bonjour, monsieur Barthes.

— Bonjour, monsieur Combes. Vos enquêtes marchent bien ?

— Pas plus que ça. Disons qu’elles somnolent. C’est bientôt l’hiver… Je ne sais pas quelle feuille de chou je vais vous acheter aujourd’hui.

— Aujourd’hui, dites, je vous fais grâce. C’est chez vous que loge ce jeune André Jousquel, le petit-fils du notaire Parfeuil ?

— C’est ça. Il est venu pour l’enterrement de son grand-père, et sa mère n’avait pas la place de l’héberger. Un charmant garçon, étudiant à Sciences politiques.

— Travailleur, ça se voit. Il m’a commandé un livre qui est arrivé hier. Pouvez-vous le lui apporter ? Dites-lui qu’il passera me payer quand il voudra.

— D’accord, si le vent et la grippe qui me guette ne me tuent pas avant que j’arrive chez moi.

Deux cents mètres après ces salamalecs d’usage, en arrivant chez lui, Joseph ne trouva à la maison que son jeune pensionnaire.

— Madame Combes et votre fille m’ont chargé de vous dire qu’elles rentreraient à temps pour le déjeuner.

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