Mort suspecte au Yukon by Mylène Gilbert-Dumas

Auteur:Mylène Gilbert-Dumas [Gilbert-Dumas, Mylène]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse; Roman
ISBN: 9782896071753
Éditeur: Soulières éDiteur
Publié: 2012-09-01T04:00:00+00:00

24

Si j’avais souri en imaginant mon cousin batifoler avec sa petite amie à la lueur des chandelles dans une autre cabane, je trouvais la chose moins drôle à mesure que les heures passaient. La disparition de Benjamin me mettait dans l’embarras. Je ne pouvais pas demander à quelqu’un d’aller le chercher − ni y aller moi-même − sans passer pour une cousine collante. Je ne pouvais pas non plus m’en aller comme ça, toute seule au milieu de la forêt, en espérant que la lune illuminerait mon chemin. Premièrement, c’était une nuit sans lune. Deuxièmement, je ne connaissais pas le chemin. Sauf qu’il était maintenant 1 heure du matin passée. Les fêtards qui m’entouraient avaient depuis longtemps vidé la première caisse de bière et entamé la seconde. Pas question de monter en voiture avec l’un d’eux. Seule Josée avait l’air encore sobre.

— Tu rentres comment au village ?

Je lui avais posé la question en essayant d’avoir l’air calme, mais en dedans, je m’inquiétais sérieusement.

— Je ne rentre pas.

Devant mon air perplexe, elle a précisé :

— Je couche ici.

Elle a fait un signe en direction de Sébastien. Bon. De toute évidence, Josée avait planifié sa soirée depuis le début. Ce n’était pas mon cas, et je sentais que j’allais payer cher ce manque de prévoyance.

Dire qu’il n’y avait même pas de sofa où m’allonger jusqu’au lendemain !

À 2 heures, n’y tenant plus, je me suis assise sur le banc à côté de Sébastien.

— Il est où, ton chien ?

Ben quoi ? J’avais l’air moins niaiseuse en posant cette question qu’en l’interrogeant sur ce qui me tenait vraiment à cœur.

— Il doit dormir dehors avec les autres.

— Ah, bon ! Et il revient quand, Benjamin ?

Cette fois, il a ri. Il a tellement ri que des larmes ont perlé aux coins de ses yeux.

— Il est en congé demain alors, attends. Ça fait mardi… euh, jeudi… euh, plus deux jours…

Il calculait mentalement, mais l’alcool lui embrouillait les idées.

— On est quel jour, aujourd’hui ?

Inutile de perdre mon temps ; ce gars-là avait sombré dans l’incohérence. J’ai jeté un dernier coup d’œil vers le beau Joseph de Barba. S’il me plaisait au début de la soirée, je trouvais qu’il faisait plutôt pitié à voir maintenant, affalé contre un mur, la tête penchée, les yeux clos. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne me donnait pas envie de le rejoindre.

J’ai repensé au trajet que j’avais parcouru avec Benjamin quelques heures plus tôt. Il n’y avait qu’un sentier. En longeant la falaise, j’arriverais à la grosse pente à pic que je n’aurais qu’à descendre jusqu’au fleuve. Ensuite, je gagnerais la Front Street et, en moins de deux, je serais dans mon lit. Je me répétais que je ne pouvais pas me perdre, même si je le voulais, et cela m’a redonné confiance. Non, je ne pouvais pas me perdre, vraiment.

C’est dans cet état d’esprit, et lasse d’attendre, que j’ai enfilé mon manteau et salué la compagnie.

Une fois dehors, j’ai trouvé qu’il faisait noir. Beaucoup trop noir à mon goût.

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