Un Lieu Secret by David Bell

Un Lieu Secret by David Bell

Auteur:David Bell [Bell, David]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Actes Sud
Publié: 2014-12-02T23:00:00+00:00


23

Janet inspira profondément, puis ouvrit la porte à l’inspecteur Stynes. Elle pensait connaître la raison de sa visite : il avait entendu parler de l’homme qui était venu chez elle. Quelqu’un avait alerté la police – Madeline, peut-être, ou un autre de ses collègues –, et Stynes venait lui demander ce qu’elle savait à son sujet.

Et s’il l’interrogeait chez elle, son père l’entendrait. Tout le monde découvrirait son secret.

Janet réfléchit à toute vitesse et décida de rester sur la véranda avec l’inspecteur, pour régler la situation loin de son père. Mais les premiers mots de Stynes bouleversèrent ses plans.

“J’aimerais parler à votre père, dit-il.

— Mon père ?

— Il est à la maison ? Je suis désolé de ne pas avoir prévenu.

— Il est là”, dit Janet.

Mais elle ne bougea pas, ne fit pas mine d’appeler le vieil homme. En lui bloquant le passage, elle espérait forcer Stynes à exposer le but de sa visite. Mais le policier maîtrisait visiblement mieux ce petit jeu. Il attendait patiemment, affichant l’expression calme et détendue de celui qui avait tout son temps devant lui.

“Entrez”, finit par dire Janet.

L’inspecteur la suivit à l’intérieur. Ils trouvèrent son père debout à côté de son fauteuil, la télé éteinte. Bill paraissait encore secoué par leur dispute et déclara immédiatement :

“Je ne veux plus entendre parler de ces histoires, Janet. J’en ai assez.

— L’inspecteur Stynes est là. Il veut te parler.”

Stynes salua son père d’un signe de tête, sans se soucier de la remarque qu’il venait de faire. De son côté, le vieil homme restait bouche bée. Janet n’était pas sûre qu’on puisse réagir autrement ni se montrer à son avantage quand un policier surgissait à l’improviste.

“Il y a un problème ? demanda Bill.

— Non, fit l’inspecteur. Je peux m’asseoir ?”

Il s’installa sans attendre sur le canapé. Ne voyant rien de mieux à faire, Janet et son père s’assirent à leur tour, elle à l’autre bout du canapé et lui dans son fauteuil.

“Comme je le disais, monsieur Manning, je suis désolé de ne pas vous avoir prévenu de ma visite. Mais ça ne devrait pas être long.

— Qu’est-ce qui ne devrait pas être long ? De quoi parlez-vous ?”

Stynes plongea la main dans la poche intérieure de sa veste en tweed, d’où il tira un petit carnet à spirales. Puis il sortit un stylo et appuya dessus. À le regarder, Janet songea qu’il avait développé une gestuelle précise et calculée au fil de ses années de pratique. Il ne sortait pas seulement un carnet et un stylo : il gagnait du temps, prolongeait le suspense pour augmenter la nervosité de la personne qu’il s’apprêtait à interroger.

Mais alors, pourquoi réservait-il ce traitement à son père ?

Le soupçonnait-il de quelque chose ? D’avoir joué un rôle dans la mort de Justin ? Un élan de colère traversa Janet, qui le réprima aussitôt. Pourquoi reprocher à Stynes ce qu’elle venait elle-même d’imaginer ?

“Comme vous le savez sûrement, le meurtre de Justin est de nouveau sous les feux de l’actualité, commença Stynes.

— Oui.

— Je me suis replongé dans mes notes de l’époque.



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