L’invasion de la mer by Jules Verne

L’invasion de la mer by Jules Verne

Auteur:Jules Verne
Format: epub


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Au kilomètre 347

Il avait été question d’appeler Roudaire-Ville le point où aboutissait le second canal sur le Melrir. Puis, comme le canal, en somme, avait pour terminus réel le bord occidental du chott Melrir, on avait pensé à remplacer son nom de ce côté par celui du président de la Compagnie franco-étrangère, et à réserver celui de Roudaire pour le port à établir du côté de Mraïer ou de Sétil, en connexion avec le transsaharien ou une ligne ferrée s’y rattachant. Enfin, comme son nom avait été donné à la crique du Rharsa, l’habitude s’était conservée d’appeler ce point le kilomètre 347.

De cette tranchée de la dernière section, il ne restait plus vestige. Les sables y étaient amoncelés dans toute sa largeur et sur une étendue de plus de cent mètres. Que le creusement n’eût pas été entièrement terminé en cet endroit, c’était admissible. Mais, à cette époque, – et M. de Schaller ne l’ignorait point, – c’est tout au plus si un bourrelet de médiocre épaisseur aurait dû barrer l’extrémité du canal, et quelques jours auraient suffi pour l’éventrer. Évidemment des troupes de nomades endoctrinées, fanatisées, avaient passé par là et avaient ravagé et détruit, en une journée peut-être, ce que le temps avait si bien épargné.

Immobile sur un étroit plateau qui dominait le canal à sa jonction avec le chott, muet, les deux officiers près de lui, tandis que le détachement stationnait au pied de la dune, l’ingénieur, ne pouvant en croire ses yeux, contemplait mélancoliquement tout ce désastre.

« Il ne manque pas de nomades dans le pays qui ont pu faire le coup... dit le capitaine Hardigan, que ce soient des tribus soulevées par leurs chefs, des Touareg ou autres venus des oasis du Melrir ! Ces détrousseurs de caravanes, enragés contre la mer Saharienne, se sont certainement portés en masse contre le chantier du kilomètre 347... Il aurait fallu que la contrée fût jour et nuit surveillée par les Maghzen, pour empêcher les agressions des nomades. »

Ces Maghzen, dont parlait le capitaine Hardigan, forment un complément de l’armée régulière d’Afrique. Ce sont des spahis et des zambas chargés de la police intérieure et des répressions sommaires. On les choisit parmi les hommes intelligents et de bonne volonté, qui, pour une raison quelconque, ne tiennent pas à rester dans leur tribu. Le burnous bleu est leur signe distinctif. Tandis que les cheiks ont le burnous brun et que le burnous rouge appartient à l’uniforme des spahis et est aussi l’insigne d’investiture des grands chefs. On trouve des escouades de Maghzen dans les bourgades importantes du Djerid. Mais c’est tout un régiment qui aurait dû être organisé pour se transporter d’une section à l’autre pendant la durée des travaux, en prévision d’un soulèvement possible des indigènes, dont on connaissait les sentiments hostiles. Lorsque la nouvelle mer serait en exploitation, lorsque des navires sillonneraient les chotts inondés, ces hostilités seraient moins à craindre. Mais, jusque-là, il importait que le pays fût soumis à une surveillance rigoureuse. Les attaques dont



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