Le Porteur de Mort, Tome 4, Poursuite by Angel Arekin

Le Porteur de Mort, Tome 4, Poursuite by Angel Arekin

Auteur:Angel Arekin [Arekin, Angel]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Editions Plume Blanche
Publié: 2019-03-10T23:00:00+00:00


Les collines d’herbes rases étaient baignées de soleil. Je les regardais défiler d’un air apathique, avachie sur le garrot de mon cheval, les mains soigneusement attachées dans le dos. La douleur martelait mon visage. J’avais l’impression de sentir chaque veine, chaque goutte de sang, chaque cellule, chaque monceau de chair bien vivants. Mes joues me brûlaient. Je fermai les paupières et tentai d’effacer la douleur. Le temps façonne son œuvre sur le corps des Assens. Plus ils vieillissent, plus ils guérissent vite sans avoir besoin de faire peau neuve en mourant. Cependant, j’étais encore si jeune. Je n’avais pas six mois depuis ma mort dans la maison de Point-de-Jour. Il me faudrait certainement du temps.

Le Limier nous obligeait à mener un train d’enfer. Il voulait aller vite, jusqu’à ce que Seïs tombe à genoux d’épuisement ou qu’il disjoncte à force d’imaginer ce qu’il pourrait nous faire endurer. Le voyage en compagnie du Limier risquait d’être long et pénible pour parvenir à fatiguer suffisamment Seïs. Je savais qu’il n’abandonnerait pas. Seïs avait beaucoup de défauts, mais pas celui-là.

Le type examinait les collines comme s’il pouvait les dévorer. Une ride épaisse barrait son front. Il cherchait à faire croire qu’il maîtrisait la situation or, il semblait anxieux.

Il accorda une brève halte, le temps que les chevaux boivent et qu’il remplisse sa gourde. Il me fit descendre sur son épaule et me jeta sur le sol, comme un vieux sac de jute. Rayne se posta près de moi dès qu’il sauta à terre, s’agenouilla devant le cours d’eau et remplit ses mains en obole pour m’aider à boire. Je lapai dans sa main et le remerciai d’un sourire crispé. Il but à son tour sans lâcher du regard le Limier.

« Pourquoi tu ne t’es pas sauvé ? » lui demandai-je à voix basse.

Il ébaucha une petite moue contrite. « Je… je ne voulais pas te laisser seule. Je pourrais… tu sais. » Il m’adressa un regard explicite.

Je fis « non » de la tête.

Il se lava les mains et se mouilla la figure, puis leva les doigts sur mon visage et les fit glisser doucement le long de la plaie qui m’ouvrait la pommette.

« À quoi ça ressemble ? »

Sa bouche se tordit.

« Tu n’es pas défigurée », siffla une voix.

Je sursautai malgré moi. Le Limier s’agenouilla aux côtés de Rayne et prit mon menton entre ses doigts noueux. Il me dévisagea. « Je pensais que les Assens guérissaient plus vite.

— Ça dépend lesquels. »

Il haussa les épaules. « De toute façon, ça ne restera pas. T’as pas à t’inquiéter pour ça… Ça te fait mal ?

— À ton avis ?

— Je sais pas trop. Je me suis toujours demandé si les Assens ressentaient la douleur comme un mortel ordinaire.

— La douleur, c’est la douleur. Elle est pareille pour tout le monde. La seule différence, c’est la capacité de chacun à l’endurer. »

Il me lâcha et caressa une barbe de trois jours. « Là est toute la question, j’imagine : quelle est ta capacité à la supporter ? »

Un frisson glacial se répandit le long de mes reins lorsqu’il enfonça ses deux globes noirs au fond des miens.



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