Le Jour où Félicité a tué la mort by Henri Gougaud

Le Jour où Félicité a tué la mort by Henri Gougaud

Auteur:Henri Gougaud [Gougaud, Henri]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fiction, Literary, General, Littérature française
ISBN: 9782226434548
Google: isaSDwAAQBAJ
Éditeur: Albin Michel
Publié: 2019-05-02T07:00:00+00:00


Elle trouva Clément dans la cour.

– Faut que je soigne votre Blaise, il pue méchamment, lui dit-il. Je vais le ficeler serré dans une toile imperméable que j’ai repérée hier sur la vieille charrue. Veillez à ce que Siméon ne vienne pas traîner au bloc opératoire. Pour le moment, il parle aux graines d’un rosier qu’il vient de semer.

– Il aime la conversation, lui répondit Félicité. Il bavarde avec tout le monde. Je l’ai même entendu, un soir, chanter un air de flamenco à un olivier andalou sous prétexte que ses racines ne devaient jamais oublier le parfum des nuits de Cadix. Va, sois tranquille, je le garde.

Clément s’en fut à la remise. Tandis qu’il ouvrait ses battants, Siméon vint sous le pommier, et la main en auvent sur ses sourcils touffus il grogna comme pour lui seul :

– Je me demande ce qu’il cherche.

Félicité :

– Rien, il aère.

Lorsque Clément réapparut au soleil venteux de la cour, sa lourde bâche sur l’épaule :

– Mais sacrénom, il déménage ? Qu’est-ce qu’il va faire avec ce tas que je n’ai jamais vu dehors ?

– Justement, il le sort. Laisse donc, ça l’occupe.

Siméon rejeta sa casquette en arrière, cracha le brin de paille qui occupait ses dents :

– Mais non, voyez, il va chez Blaise. Qu’est-ce qu’il fricote, le monsieur ?

Il l’appela. Clément ne parut pas l’entendre. Alors d’un coup de main Siméon se torcha le nez, signe annonciateur d’un départ probablement irrattrapable. Félicité lui prit le bras, chercha d’urgence que lui dire, ne trouva rien d’autre que ça :

– Et donc tu as semé des graines de rosiers.

Son calme aurait paru à n’importe qui d’autre dangereusement orageux. Siméon n’en fut pas inquiet, au contraire, il s’épanouit. Il dit en désignant la terre remuée :

– C’est pour fêter votre retour. Je craignais de ne plus vous voir.

Il resta un moment béat à contempler le vieux visage qui, du coup, lui sourit vraiment, puis revenant à son souci :

– J’aimerais bien savoir pourquoi cette bâche, qui ne vaut rien, il la transbahute chez Blaise.

– Parce qu’elle est à lui, pardi !

Réponse irréfléchie. Elle l’estima crédible. Hélas, ce fut l’instant que choisit l’imprévu pour venir gambader dans le jardin paisible.

– À lui ? dit Siméon. Le vélo, je veux bien, mais la bâche, halte-là ! Elle était à mon père. Souvenez-vous, Félicité, il vous l’a offerte, cadeau, quand il s’en est allé mourir dans son hôpital de retraite.



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