L'aveuglement by Saramago José

L'aveuglement by Saramago José

Auteur:Saramago José [José, Saramago]
La langue: fra
Format: epub
Tags: L'aveuglement
Éditeur: Seuil
Publié: 2015-02-14T15:46:43+00:00


12

Les scélérats réapparurent quatre jours plus tard. Ils venaient appeler au paiement de l’impôt les femmes du deuxième dortoir, mais ils s’arrêtèrent un instant à la porte de la première chambrée pour demander si les femmes s’étaient remises des assauts érotiques de l’autre nuit, Une fameuse nuit, y a pas à dire, s’exclama l’un d’eux en se léchant les babines, et un autre confirma, Ces sept-là valent pour quatorze, il est vrai qu’une était pas formidable, mais dans cette pétaudière ça se remarquait presque pas, ils ont de la veine ces types, s’ils sont assez hommes pour elles, Vaudrait mieux qu’ils le soient pas, comme ça les femmes ça leur démangera plus. Du fond du dortoir la femme du médecin dit, Nous ne sommes plus sept, Une s’est taillée, demanda un homme du groupe en riant, Elle ne s’est pas taillée, elle est morte, Diable, eh bien alors vous devrez trimer plus dur la prochaine fois, La perte n’est pas grande, elle n’était pas formidable, dit la femme du médecin. Déconcertés, les messagers ne surent quoi répondre, ce qu’ils venaient d’entendre leur semblait indécent, l’un d’eux aura sans doute pensé que finalement les femmes sont toutes des salopes, quel manque de respect que de parler d’une pétasse dans ces termes, simplement parce qu’elle avait le nichon pendant et la fesse flasque. La femme du médecin les regardait, immobiles à l’entrée de la porte, indécis, se balançant comme des pantins mécaniques. Elle les reconnaissait, elle avait été violée par les trois. Enfin l’un d’eux frappa le sol de son bâton, Allons, on y va, dit-il. Le bruit des bâtons et les avertissements, Écartez-vous, écartez-vous, c’est nous, diminuèrent le long du corridor, puis il y eut un silence, un brouhaha confus, les femmes du deuxième dortoir recevaient l’ordre de se présenter après le dîner. De nouveau, les coups de bâton retentirent sur le sol, Écartez-vous, écartez-vous, les silhouettes des trois aveugles passèrent dans l’encadrement de la porte puis disparurent.

La femme du médecin, qui racontait auparavant une histoire au garçonnet louchon, leva le bras et retira les ciseaux de leur clou sans faire de bruit. Elle dit au gamin, Je te raconterai le reste de l’aventure plus tard. Personne dans le dortoir ne lui avait demandé pourquoi elle avait parlé de l’aveugle insomniaque avec tant de dédain. Quelques instants après, elle ôta ses chaussures et s’en fut dire à son mari, Je ne serai pas longue, je reviens tout de suite. Elle se dirigea vers la porte où elle s’arrêta et attendit. Dix minutes plus tard les femmes du deuxième dortoir apparurent dans le corridor. Elles étaient quinze. Quelques-unes pleuraient. Elles ne marchaient pas à la queue leu leu mais en groupe, reliées les unes aux autres par des bandes d’étoffe qui avaient tout l’air d’avoir été arrachées aux couvertures. Quand elles eurent fini de passer, la femme du médecin les suivit. Aucune ne s’aperçut qu’elles étaient accompagnées. Elles savaient ce qui les attendait, l’histoire des vexations n’était un secret pour personne et



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