La sage-femme d’Auschwitz by Anna Stuart

La sage-femme d’Auschwitz by Anna Stuart

Auteur:Anna Stuart [Stuart, Anna]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman historique, WW2, Déportation, Shoah, Littérature anglaise
Éditeur: City Editions
Publié: 2023-02-22T15:42:03+00:00


20

Septembre 1943

Ester

Ester s’adossa dans le fond de la couchette, les mains sur son ventre, observant avec intérêt Pfani qui maniait l’aiguille pour tatouer sa cuisse pâle. Le dessin commençait à prendre forme, et Ester s’étonnait de voir qu’il s’agissait d’un arbre de vie, comme sorti d’une légende scandinave. Il y avait des écureuils et des hérissons à sa base, des oiseaux dans les branches et, si étrange qu’elle trouvât le fait d’imprimer de l’encre dans sa peau, elle devait reconnaître que c’était assez beau.

— Tu es douée, dis donc.

Pfani leva les yeux vers elle, surprise.

— Merci, grommela-t-elle. C’est une occupation comme une autre.

Ester regarda autour d’elle. C’était dimanche – leur seul jour de repos – et, avec le soleil d’automne qui brillait dehors, toutes celles capables de sortir de leur couchette en profitaient. Quelques jours plus tôt, le gel leur avait mordu les pieds quand elles étaient sorties pour l’appel du matin, et certaines des plus anciennes détenues avaient commencé à évoquer l’horreur de l’hiver à Birkenau, si bien que tout le monde voulait s’imprégner de la chaleur du soleil tant qu’il y en avait. Ester était rentrée en raison d’un léger vertige et pour avoir quelques minutes de solitude, mais elle avait vite été fascinée par l’aiguille de Pfani.

— Est-ce que tu dessinais avant de… enfin, tu vois ?

— Un peu. Je dessinais quand j’étais gamine, mais ma mère est morte, et là où on m’a casée après, je n’avais pas le droit de « perdre mon temps avec ces bêtises ».

— Oh… quel dommage.

Ester repensa avec tendresse à l’éducation que Leah et elle avaient reçue – stricte, mais pleine d’amour – et tendit une main compatissante vers la rousse devant elle, mais Pfani eut un mouvement de recul, refusant son élan de sympathie.

— C’est comme ça, c’est tout. Heureusement, Mme Lulu était plus gentille.

— Mme Lulu ?

— La patronne du bordel. J’avais quatorze ans quand je suis arrivée là-bas. J’étais du genre précoce.

Elle dit tout cela d’un ton parfaitement détaché et Ester s’efforça de masquer sa stupeur. Elle avait beau savoir que Pfani était ici en tant que prostituée, jamais elle ne s’était demandé pourquoi.

— Et, euh, tu as pu recommencer à dessiner, là-bas ?

— Sur les murs, oui. Mme Lulu aimait les couleurs, alors je lui ai peint de grands paysages. Des couchers de soleil, des arbres en automne, des scènes des tropiques. Elle adorait les tons rouges et orangés. Plutôt sensuels, quoi.

— Je comprends.

Ester regarda Pfani imprimer une feuille morte dans sa peau. De petites gouttes de sang apparaissaient quand l’aiguille s’enfonçait, sans que cela paraisse la perturber le moins du monde. Brusquement, elle releva la tête.

— Tu sais, j’ai été dans pas mal de camps différents depuis mes huit ans, mais celui-ci, c’est le pire de tous. Je serais prête à accepter les pires perversions sexuelles d’un homme pour pouvoir partir d’ici.

— Il y a un bordel à Auschwitz I, dit soudain une voix en provenance de porte.

C’était Naomi.

— Un bordel ? demanda Ester, stupéfaite.

De loin en loin, elles entendaient des histoires à propos d’Auschwitz I, le camp de



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