LA bete dans la maison T1 by Kadyan

Auteur:Kadyan [Kadyan]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Homoromance Éditions
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Novembre 2054

De mon abri surplombant la vallée, je hurle ma tristesse. Mon oraison funèbre à ma famille perdue. Dans le lointain, mes frères loups chantent avec moi ; toute une meute vers le col déjà enneigé. Je geins d’entendre leurs chants refléter mon désespoir. Peut-être, demain, essayerai-je de les rejoindre pour chasser, avoir de la compagnie… s’ils m’acceptent…

Bientôt la première neige envahira cette vallée, je le sens. L’odeur de l’air est différente, elle charrie une humidité caractéristique qui me rappelle les hivers russes. Cette grotte trouvée sous ma forme de loup est parfaite. Vallée haute encaissée, protégée par un passage escarpé de la vallée basse, suffisamment grande pour avoir assez de gibier et, en bonus, une superbe grotte, difficile d’accès, cachée tout au fond de la vallée. Le poste de garde installé dans la vallée basse semble inoccupé à cette saison. Il fait trop froid certainement pour craindre les braconniers et les randonneurs. Voyant la cabane vide, je me suis rapprochée de la carte d’information pour avoir une idée de la topographie du lieu. Comme je le pensais, je suis bien dans un parc national géré par l’État suisse, ce qui veut dire pas mal de monde en été, mais il semble qu’un seul sentier passe dans la vallée où je me suis établie et le commentaire indiquant « Pour montagnards expérimentés » me garantit que peu de personnes viendront me déranger. Bien !

Sous ma forme humaine, assise sur le pas de la grotte, je contemple les sommets entièrement enneigés. Bientôt, toute la vallée sera blanche. Il me faut une provision de bois sec et installer à l’abri les quelques affaires que je possède. Me construire une litière aussi. Ça a été une bonne idée de ne pas trop abîmer la peau du dernier cerf que j’ai tué, elle me servira à recouvrir les branchages et les feuilles qui seront mon matelas. De toute façon, si le froid devient trop mordant, je passerai l’hiver sous ma forme animale. Sous ma forme humaine, je pense trop, même ma forme de loup ne m’empêche pas de penser… Laure et sa douceur, Tim, mon p’tit loup… Igor… ma famille… perdue à cause de la haine… Respire… allez, mon tigre, viens me faire oublier qu’ils ne reviendront pas. Toi au moins, tu ne penses pas, tu es sans pitié, sans remords… viens… chaleur, douleur…

Je bondis joyeusement de rocher en rocher, humant l’air à la recherche de ma future proie. Le troupeau de biches aperçu ce matin près de la rivière ne doit plus être très loin.

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