Bonsoir les choses d'ici-bas by Lobo Antunes Antonio

Bonsoir les choses d'ici-bas by Lobo Antunes Antonio

Auteur:Lobo Antunes, Antonio [Lobo Antunes, Antonio]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature Portugaise
Éditeur: La Gang©
Publié: 2015-05-30T22:00:00+00:00


7

Il y a des moments comme aujourd’hui où je me sens fatigué, je me couche dans l’hôtel à Mutamba et je vois à travers les carreaux un vide que je n’ose pas appeler ciel car aucun vent ne le balaie, aucun nuage ne prouve son existence, aucun insecte ne surgit d’un coin pour vrombir à mes oreilles au fil de mon insomnie

l’insomnie, la lumière allumée et un oreiller lancé au plafond pour atteindre ce qui m’a semblé être un insecte mais rien, puis de nouveau un bourdonnement à mes oreilles et aussitôt une chaussure dans mon poing, vindicatif, aux aguets, alors que ce n’était peut-être pas un moustique, mais mes oreilles, détachées de moi, qui menaçaient ma joue, mon cou, mon ventre, se cachant dans une lézarde au plafond, je les voyais sur le mur mais elles disparaissaient aussitôt, se taisaient un instant, promettaient de s’éteindre, je les tâtais sur ma tête

— Elles sont là

mais dès que je cessais de les palper elles se dispersaient dans la chambre pour exister dans tous les endroits à la fois tout comme aujourd’hui j’ai l’impression d’exister dans tous les endroits de ma vie à la fois, moi sur la plage coiffé d’un chapeau de paille dont l’élastique me serrait et ma mère en me l’enfonçant jusqu’aux yeux

— Tu veux tomber malade ?

condamné à faire des pâtés de sable avec une pelle et un seau, le soir où mon père, m’apercevant, a soudain quitté les bras d’une cousine

ou d’une voisine du sous-sol

la cousine tournée de profil parlait avec une moitié de ses lèvres, tandis que sa main rentrait un sein sous son chemisier, un sein qui glissait vers un nid invisible que laissaient deviner d’obscures transparences, des petits nœuds, des rosaces

— Tu crois qu’il a compris ?

l’un de ses bas fripé, moi cherchant à l’aider

— Rectifie ce bas cousine

les yeux de mon père qui me demandaient quelque chose lié à ma mère

quoi ?

elle qui toujours quand il déplaçait les objets

— Tu es si maladroit

le matin où je suis entré pour la première fois dans le Service, le directeur a levé ses yeux d’un dossier

— C’est donc vous Miguéis très bien

ses yeux baissés sur le dossier et moi debout devant lui, ailleurs, le directeur a répondu au téléphone, corrigé une phrase, remarqué quelque chose de bizarre dans son bureau et c’était moi qui étais là

— Vous bayez aux corneilles Miguéis ?

non

— Vous êtes encore là ?

il va me demander de copier vingt-cinq fois les prépositions après avoir nettoyé mon ardoise en me tournant de l’autre côté s’il vous plaît, dans l’arène des taureaux, des trompettes, des applaudissements, une porte s’ouvrant à l’endroit où j’étais enfermé et une main frappant les planches pour m’appeler

— Tu dors Miguéis ?

comment aurais-je pu m’endormir alors que des dizaines d’oreilles me tournaient autour et ma chaussure qui se ramollissait dans ma main, il y a des moments comme aujourd’hui où je me sens fatigué, je me couche dans l’hôtel à Mutamba et à travers les carreaux un vide que je



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