Une désolation nommée paix by Arkady Martine

Une désolation nommée paix by Arkady Martine

Auteur:Arkady Martine [Martine, Arkady]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: J’ai lu
Publié: 2021-08-03T11:56:29+00:00


Si Trois Posidonie connaissait plusieurs manières de porter un chaton, aucune ne plaisait à l’animal kauraani. Le tenir par la peau du cou semblait impoli, surtout qu’elle ne savait pas trop à quel moment elle devrait le reposer, et quand elle le berçait comme un bébé humain, il lui perforait la peau de chacune de ses nombreuses griffes.

Elle finit par renoncer et par le laisser s’installer sur son épaule, ce qui parut lui convenir. Les perforations continuèrent, mais elles semblaient moins malveillantes, comme s’il s’en servait avant tout pour se stabiliser. Elle se demandait toujours que faire de l’animal. Elle n’envisageait pas une seconde de l’emmener dans la cabine qu’elle était censée partager avec Mahit, et de toute manière, elle ne voulait pas s’y rendre. Pas tout de suite. Peut-être même pas du tout.

Dans la Cité, ce serait un de ces moments où elle se trouverait un bar correct et un inconnu intéressant pour la distraire. Peut-être y avait-il des bars et des inconnus sur les vaisseaux de la Flotte. (Des inconnus, il y en avait forcément. Certains aimeraient peut-être même avoir un chaton kauraani. Elle pouvait garder espoir !) Demandant à son lien-nuage de localiser le plus proche espace récréatif qui ne soit pas un centre de fitness ou d’exercice (par les étoiles, elle ne voyait pas ce dont elle pourrait avoir moins envie que de faire de l’exercice), elle se laissa guider jusqu’à…

… ce qui n’était pas un bar. Pas exactement.

Ailleurs que sur un vaisseau de la Flotte, ça en aurait sans doute été un. Il y avait des tables, de la musique (un morceau plein de synthétiseurs dont Trois Posidonie se rappelait vaguement qu’il avait été populaire l’hiver précédent), un éclairage plus tamisé que dans les corridors, beaucoup d’inconnus et même de la nourriture qui n’aurait pas déparé dans un bar : des nouilles frites, des grains de maïs trempés dans des épices et du vinaigre, des chips de manioc. Mais pas d’alcool.

Impossible de s’enivrer en dehors de son quart, fallait-il croire. Du moins, pas avec la puce de crédit de la Flotte.

Personne n’étant ivre, son entrée fit se retourner toute la salle. Ce qu’elle trouva plutôt flatteur. Elle se représenta le tableau : une émissaire de l’Information en uniforme orange corail, le plus brillant dans cet océan de gris et or de la Flotte, un chaton sur l’épaule. Un tableau absurde. Peut-être absurde à en devenir menaçant.

« Salut, lança-t-elle d’un ton enjoué. Qu’est-ce que vous me conseillez, ici, question nourriture ? Pour moi, mais aussi pour cet… animal. »

Il y eut un silence retentissant. Elle attendit qu’il vole en éclats. Il le faisait toujours. La curiosité et l’intérêt ne manquaient jamais de l’emporter, quand on manifestait assez de patience et d’aplomb.

Ce fut néanmoins dix insoutenables secondes d’attente. Enfin, une femme installée seule au non-bar – elle portait des insignes de cuecuelihui, c’était donc une sous-officière spécialiste de quelque chose – répondit : « Les gâteaux de nouilles frites. Pourquoi avez-vous un chat, Émissaire ? » et tout le monde se détendit.



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