Un océan de rouille by Cargill C. Robert

Un océan de rouille by Cargill C. Robert

Auteur:Cargill, C. Robert [Cargill, C. Robert]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science Fiction
ISBN: 9782226449801
Éditeur: Albin Michel
Publié: 2020-01-02T13:19:00+00:00


Chapitre 10010

La chèvre de Judas

* * *

En 1959, des pêcheurs travaillant au large des îles Galapagos avaient eu la bonne idée d’y lâcher trois chèvres ; ils espéraient qu’elles allaient se reproduire et leur fournir du gibier quand ils arriveraient au bout de leurs réserves de viande. Dans l’histoire des idées stupides, celle-ci est l’une des pires – du moins en ce qui concerne les conservateurs écologistes de l’époque. Paradoxalement, les humains éprouvaient une étrange fascination pour la vie sauvage, qu’ils tenaient absolument à préserver. D’un côté, ils changeaient la composition de l’atmosphère et des océans et coupaient ou incendiaient des pans entiers de forêt et de jungle pour y construire leurs villes et leurs exploitations agricoles, causant des dégâts irréparables à la nature, et de l’autre, ils se donnaient bonne conscience en s’arrangeant pour que les espèces au bord de l’extinction survivent dans tel ou tel endroit reculé du monde – même s’il ne s’agissait que de clades condamnés à brève échéance.

Les tortues, par exemple. Aucune industrie importante n’en dépendait, mais les gens aimaient bien ces animaux. Et les îles Galapagos occupaient une place spéciale dans leur cœur, puisqu’il s’agissait du lieu où était née et s’était développée la théorie de l’évolution.

Quarante ans à peine après l’introduction de ces trois chèvres sur les îles, leur population avait explosé ; on en comptait environ 100 000, avec un impact désastreux sur l’environnement. Elles avaient détruit le paysage, mais plus grave encore, la source de nourriture des tortues. Ce qu’on ne pouvait plus tolérer. Le projet Isabela était né.

Un groupe de chasseurs ayant suivi une formation consistant à éliminer les chèvres le plus humainement possible (à l’aide d’hélicoptères et de fusils puissants) a été lâché sur ces bêtes qui ne se doutaient de rien. Mais les dénicher s’est avéré particulièrement difficile. Les humains ont donc équipé quelques chèvres de balises de repérage, leur ont injecté assez d’hormones pour qu’elles restent en chaleur en permanence et les ont relâchées pour attirer les autres chèvres éparpillées. On a baptisé ces traîtresses les chèvres de Judas.

Les hélicoptères fondaient sur les troupeaux, les massacraient en épargnant les chèvres de Judas, et laissaient pourrir les carcasses dont les nutriments enrichiraient cette terre que ces mêmes chèvres avaient détruite, restaurant l’équilibre des îles. Quand toutes les chèvres d’un troupeau avaient été éliminées, les chèvres de Judas repartaient à la recherche d’un autre troupeau auquel se joindre pour se reproduire, sans se douter le moins du monde du rôle qu’elles jouaient dans l’extinction de leur lignée.

Les unités centrales avaient beaucoup appris de l’histoire des humains. D’ailleurs, elles ne manquaient pas d’en citer des épisodes chaque fois qu’elles envahissaient une colonie. Et cela faisait des années qu’on parlait de cette histoire. Y avait-il vraiment des robots de Judas ? J’avais toujours pensé que c’était une légende urbaine, comme l’histoire de ce robot revenu de VIRGIL, ou celle de l’IA qui se serait téléchargée elle-même sur Internet, où elle aurait survécu discrètement, en tâche de fond, jusqu’à la fermeture définitive du réseau.



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