Robert Bloch - Le crepuscule des stars by Le crepuscule des stars

Auteur:Le crepuscule des stars [stars, Le crepuscule des]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

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Au printemps de l’année 1926. j’étais amoureux, mais j’étais aussi, plus que jamais, « dans le cinéma ». Et le cinéma connaissait son âge d’or.

Ce fut l’année où on tourna sept cent cinquante films qui furent projetés dans les vingt mille salles des États-Unis, rapportant deux millions de dollars par jour. De bons chiffres tout ronds, de bons dollars tout ronds, réalisés en Amérique.

Ce fut aussi l’année de l’invasion étrangère – Jannings et Veidt. Asther et Murnau, Lya de Putti et Camilla Horn. Les frères Hanson arrivèrent de Suède, ainsi que Maurice Stiller et une jeune inconnue aux cheveux filasse du nom de Greta Garber, ou Garbo – quelque chose comme ça.

Et ce fut l’année où Hollywood eut la folie des chevaux. Tous les matins. Elobart Bosworth se promenait sur l’allée cavalière de Santa Monica Boulevard, et le dimanche après-midi, Will Rogers et sa bande jouaient au polo. Le Brown Derby[13] de Vine Street installa un poteau pour que Tom Mix puisse y attacher son cheval Tony. Ce n’était qu’une plaisanterie, bien sûr, mais, à cette époque, qu’est-ce qui ne l’était pas ?

La seule chose importante, c’était ce qui se passait entre Aurora et moi. Cela ne nous empêchait pas de rire, mais nous prenions cela au sérieux.

Il n’y avait jamais assez de place pour sa garde-robe, dans ma penderie, mais, à part ça, nous n’avions pas de problèmes tant que nous étions ensemble. Et nous ne nous quittions plus, désormais, si ce n’est pour une mémorable occasion.

Ce fut le fameux soir où Aurora partit passer le week-end chez sa mère. « Il faut que j’y aille, me dit-elle, essayant de surmonter la réticence qu’elle montrait chaque fois qu’il était question de Kate La Buddie. Elle a de tels ennuis avec Buddie, elle n’arrive pas à lui trouver du travail. » Aurora me sourit. « Ne fais pas cette tête-là. mon chéri. Je serai de retour dimanche soir.

— Nous ne sommes que vendredi.

— Repose-toi. Cela ne te fera pas de mal d’aller au lit de bonne heure, pour une fois.

— Mais je n’arrête pas d’aller au lit de bonne heure. »

Elle me tira la langue, puis vint dans mes bras. « Deux jours seulement, murmura-t-elle. Sois patient.

— Aucun homme n’est une île, dis-je. Et bien peu sont même un continent.

— Pardon ?

— Rien. Seulement John Donne revu et corrigé par moi.

— Qui est-ce ?

— Un écrivain. Il fait les scénarios de Rin-Tin-Tin. »

Puis elle partit et je me retrouvai seul et, je ne sais pourquoi, ce n’était pas très agréable. Alors, pourquoi ne l’épouses-tu pas ? me demandai-je.

Je restai un moment à retourner cette idée dans tous les sens. Ce n’était pas la première fois qu’elle me passait par la tête. Aucun homme n’est une île, et deux personnes ensemble ne peuvent être une île non plus. Tôt ou tard, Aurora et moi allions devoir envisager notre avenir en fonction des gens qui nous entouraient.

Les bobines se mirent à tourner et les images défilèrent. Il était temps d’envisager notre avenir sous la forme d’un nouveau film. Mon prochain film, et celui d’Aurora.

Rêveries était distribué, et nous étions lancés.

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