Quoi qu'il arrive by Laura BARNETT

Quoi qu'il arrive by Laura BARNETT

Auteur:Laura BARNETT [Barnett, Laura]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Les Escales
Publié: 2016-06-14T16:00:00+00:00


VERSION 1

L’île

Grèce, août 1975

* * *

Sur le bateau en provenance d’Athènes, ils s’assoient sur le pont supérieur, à la poupe, exactement comme la première fois. Les couleurs vives sont semblables au souvenir qu’a gardé Jim des photos prises avec son Nikon : le bleu profond de la mer infinie ; les jaunes blanchis de la terre qui s’éloigne à l’horizon ; le panache de ciel azur.

Il ferme les yeux, sent le soleil sur son visage. Les vibrations du moteur ressemblent au ronron de quelque grande créature inoffensive, étouffant la conversation des autres passagers – une Américaine, tout près, lit à haute voix un livre du Dr Seuss à un petit enfant ; de l’autre côté, une famille grecque partage de la spanakopita et des morceaux de feta qui s’émiettent. Il prend la main d’Eva, se rappelant que, pour leur première visite – leur lune de miel ; tout était si nouveau, tout était encore possible –, elle portait une robe à carreaux bleus et blancs, et ses pieds étaient nus et bronzés dans ses sandales blanches.

— Est-ce que tu as toujours cette robe ? dit-il, sans ouvrir les yeux.

— Laquelle ?

— Celle que tu portais pour notre lune de miel. À carreaux bleus et blancs. Ça fait des années que je ne l’ai pas vue.

— Non.

Elle lui lâche la main. Il l’entend prendre son sac à main, fouiller dans ses profondeurs encombrées.

— Je l’ai donnée à la braderie de l’école de Jennifer, Jim. Elle avait plus de vingt ans.

Tandis que le ferry s’approche de l’île, ils vont avec les autres passagers à la proue du bateau : toujours cet accès enfantin d’excitation dès qu’on aperçoit la terre. Il y a la tour de guet croulante à l’entrée du port ; il y a les collines broussailleuses au-dessus de la ville, si étonnamment vertes comparées aux rues desséchées d’Athènes. (Un Athénien qu’ils avaient croisé sur le ferry, la dernière fois, avait fait une blague dans un anglais scatologique impressionnant : « On dit que lorsque Dieu a créé Athènes, il s’est ouvert les tripes et a chié du béton. ») Il y a la ville elle-même – si on peut appeler ainsi cette petite série de maisons, disposées en gradins comme un amphithéâtre autour du port ; le dôme de l’église ; le bar et la taverne sur le quai, où des vieux marmonnent pendant leur partie de backgammon en fin d’après-midi.

Jim se souvient des ânes, aussi : frêles et assaillis par les mouches, abandonnés à midi en plein soleil ; ça l’avait contrarié, et Eva l’avait surpris en disant qu’il ne devait pas juger d’après ses critères anglais. Mais il ne voit pas d’âne, cette fois, et la ville semble avoir doublé de taille. De nouvelles maisons – certaines encore inachevées, les fers torsadés dépassant des blocs de béton armé – s’alignent sur les terrasses supérieures, et les bars et tavernes ont proliféré. À quelques mètres du quai, un couple entièrement habillé de blanc sirote des cocktails à l’ombre d’un auvent à rayures, au son d’un disque d’Elton John qui se répand par la porte ouverte du bar.



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