Le serment du coq by Olympe Mercier

Auteur:Olympe Mercier [Mercier, Olympe]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Amitié ; Religion ; Enfance ; Résilience ; Retrouvaille
Éditeur: Le Lys Bleu Éditions
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Le différend entre les deux enfants se prolongea de même que leur mutisme. Le programme de Franz en devint bafoué. Il avait bien tenté de contacter Eleanor pour avoir un peu de compagnie, mais cette dernière répondait aux abonnés absents. Chaque instant où le garçon la contactait, Madeleine De Buysier, sa mère, prétextait un empêchement qui semblait être dicté à la dernière minute tant la voix de la matriarche était hésitante. Il raccrochait alors chaque fois le combiné en se demandant ce qu’il avait bien pu commettre pour que son premier amour l’évite de la sorte. Il essaya d’autres copains d’école – parfois proches, parfois de simples camarades de jeu – mais tous étaient également trop occupés pour consacrer un peu de leurs vacances au jeune Lecomte. Ce dernier resta seul, en compagnie d’une mère endeuillée, d’un père affairé dans son bureau, d’un piano au do central écorché, mais seul tout de même.

Au bout d’une semaine, il rassembla tout son courage et son humilité pour composer le numéro de téléphone des Ouranov. Arrachant les peaux mortes de ses lèvres gercées, il pria pour qu’Ange ait saisi en premier le combiné et soit celui qui annoncerait le « allô ». Là, qu’il serait facile de tout effacer et tout recommencer ensemble. Ils affronteraient le retour d’Arthur et bien pire encore. Hélas, ce ne fut pas une voix juvénile qui décrocha, mais une tout autre, virile, nonchalante et quelque peu agacée :

— Allô ? C’est pour quoi ? demanda l’homme au bout du fil qui semblait être le beau-père de son meilleur ami.

— Bonjour Sidney, c’est Franz répondit le garçon d’une voix chevrotante. Est-ce que je pourrais parler à Ange ?

— Ah, Franz ! Excuse-moi je ne t’avais pas reconnu ! Comment vas-tu, mon grand ? La forme ? Ah oui, c’est vrai, Ange m’a dit pour ton grand-père : toutes mes condoléances.

— Euh... merci. Je pense que ça va… Justement, Sidney, serait-il possible de parler à Ange ?

— Disons que ça ne va pas être possible, genre, pas du tout. Ange n’est pas à la maison, ni aujourd’hui, ni demain, ni le reste des vacances.

— Comment ça ? Je ne comprends pas. Il est en vacances ? Il revient quand et comment je peux le joindre ?

— Nan, écoute : laisse tomber l’affaire. Je t’assure qu’on a pris la meilleure décision en l’éloignant un moment. Je ne sais vraiment pas ce qui lui a pris ; enfin, je devrais dire « leur a pris ». C’est à croire qu’Ange et Lana ont berné tout le monde avec leurs histoires !

L’homme éclata de rire. Il semblait fou par sa manière de craquer sa voix, habituellement rauque, dans les aigus. Franz lui-même ne se sentait plus aussi sain d’esprit. Comme à son habitude, il assistait à une conversation où une seule partie semblait en possession de l’information la plus cruciale. Il avait toujours cette sensation d’être un enfant ignorant écoutant les adultes parler sans comprendre et sans explication à la clé.

— Non, mais vraiment, quelles bandes de petites putes, reprit Sidney avec une froideur sinistre.

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