Journal d'une robe noire by H. V. Gavriel

Journal d'une robe noire by H. V. Gavriel

Auteur:H. V. Gavriel
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fiction et littérature
Éditeur: Éditions Textes Gais
Publié: 2013-06-23T00:00:00+00:00


Donc, ma soirée d'anniversaire, je n'ai rien voulu faire. Je suis resté chez moi. Je me suis fait des pâtes, j'en ai mangé la moitié en regardant le JT de Pujadas, et j'ai jeté le reste. J'ai préparé un café, je l'ai jeté aussi, il était déjà froid quand j'ai pensé à porter la tasse à ma bouche. Et j'ai sorti la bouteille de bourbon de Jacques. Je me suis servi un premier verre, et je suis allé dans sa chambre, notre ancienne chambre. J'ai allumé la bougie, salué sa photo, et j'ai trinqué à sa santé. Je ne l'ai montré à personne, car je ne laisse rentrer personne dans sa chambre, mais j'ai installé comme une sorte d'autel. Comme faisaient les Romains de l'antiquité, pour honorer les dieux Lares, les esprits de la Maison. Jacques est l'esprit de cette maison.

J'ai mis des photos, dans des cadres différents, une photo de lui jeune homme, par un professionnel, en noir et blanc, magnifique, une autre récente, c'était juste quelques mois avant son accident, assis dans son fauteuil avec un livre à la main, je l'avais surpris, il avait levé la tête vers moi, intrigué, lunettes sur le bout du nez, dans son chandail bleu. Une autre photo de nous deux, posant comme des amoureux, en costume, le jour de notre Pacs. Une d'Arthur et Jacques sous le sapin de Noël du salon, père et fils si semblables. Et la dernière, au mariage de Nikos et Catherine, nous sommes avec les mariés, Nicole et Constantin, Théo et Mélanie accroupis devant. Tous les gens que j'aime, sur cette petite table. J'y ai posé les lunettes de Jacques. Nos alliances, nouées par un petit ruban bleu. Et une bougie. De temps en temps, je viens m'assoir sur le lit, pas le lit médicalisé, je l'ai rendu, mais notre lit matrimonial d'avant, j'allume la bougie, et je parle à Jacques.

Ce ne sont pas de grandes discussions philosophiques, oh non, et pas toujours des délires amoureux non plus. Parfois oui, cela m'arrive, il faut bien le reconnaître. Mais pas toujours. Parfois, ce sont juste de petites choses, de petites choses du quotidien que je lui raconte. Des bêtises, des petits riens. Je lui donne des nouvelles d'Arthur. Je lui raconte ma journée de travail. Je m'indigne de l'augmentation des charges de copropriété. Est-ce que c'est normal, Docteur ? Je ne crois pas non. Mais est-ce dangereux ? Je veux dire, est-ce que je deviens dingue ? Je ne le crois pas non plus. C'est une façon d'exorciser l'absence, le manque. Mais c'est aussi un moyen de… de rester là. De m'ancrer dans cette réalité. Ce sont des petits moments où l'automate redevient humain, avec des émotions, des sentiments, qui parviennent à s'exprimer.

Alors ce soir, à mon deuxième ou troisième verre… ou peut-être le quatrième, je ne me rappelle plus trop, à plat ventre en travers du lit, tout en passant ma main au-dessus de la flamme de la bougie, puis mon poignet, pour que les cicatrices



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