Hipnofobia by Macip

Auteur:Macip
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Hachette Black Moon
Publié: 2012-06-15T00:00:00+00:00

Seconde partie

SANDCLIFF

5. Vulnérables

I

Enregistrement #231, 5 mars 2014. Patient : PDB.

« La première fois, je ne me suis souvenu d’aucun détail à mon réveil. Mais j’éprouvais encore cette sensation tellement difficile à décrire. Vous voyez ce que je veux dire ? Un trouble, un épuisement. De ne pas m’être bien reposé. Je n’y ai pas fait plus attention que ça.

Ce n’est que bien plus tard, au bout de deux ou trois semaines peut-être, que j’ai compris que tout avait commencé cet après-midi-là. Le rêve s’était alors répété à plusieurs reprises. Deux fois. Non, trois, peut-être. Je n’arrivais toujours pas à les fixer, seulement quelques détails isolés, mais leurs effets étaient évidents. Je me levais anéanti. Exactement comme si on m’avait bouffé de l’intérieur.

On parlait de la première fois, oui. Ce devait être un samedi. Ça n’a pas tellement d’importance, je suppose. Je n’avais pas beaucoup dormi la nuit précédente. À cause d’une fête, je crois. Je me suis allongé après déjeuner. Moi, je ne fais pas la sieste. Habituellement, je veux dire. Vous croyez que ça a quelque chose à voir ? Non, bien sûr. Maintenant, ça m’arrive aussi en pleine nuit. Ce doit être autre chose.

Je n’avais pas conscience du temps passé à dormir jusqu’à ce que je regarde ma montre. J’étais désorienté. En sueur. Mon cœur battait comme si je venais de piquer un sprint. J’avais la sensation que j’étais allongé sur ce canapé depuis des heures, qu’il devait faire nuit, même. Mais il ne s’était pas écoulé plus d’un quart d’heure.

Je me sentais encore plus mal qu’avant. Cette espèce de malaise s’était amplifiée. J’étais anxieux. Je n’avais qu’une envie, me lever et sortir de là. Je me suis passé de l’eau sur le visage. J’ai fumé une cigarette pendant que je reprenais mes esprits. Et j’ai oublié très vite ce qui m’était arrivé.

Des jours ont passé sans autres incidents. Puis l’expérience s’est reproduite. De manière isolée, les deux ou trois fois dont je vous ai parlé. Je n’ai pas fait le lien.

Et puis, il y a eu cet après-midi-là, quand j’ai commencé à y voir plus clair, et à me souvenir de ce qui me traversait la tête quand je m’endormais. J’étais rentré chez moi particulièrement fatigué. Je me suis servi un whisky. Un demi-verre, n’allez pas croire maintenant que je bois trop. Seulement pour certaines occasions, vous me comprenez. Je me suis assis un moment devant la télé, le verre à la main, pour me reposer cinq minutes. Je me suis endormi immédiatement.

Je me rappelle avoir éprouvé la même chose, cette sensation de ne pas savoir combien de temps s’était écoulé. La fatigue, les palpitations. La différence, cette fois-ci, c’était que je ne pouvais plus me lever. Comme si j’étais attaché. Comme si mon système nerveux avait été déconnecté. Je ne sais pas si je m’explique bien. J’envoyais des ordres à mes bras mais ils ne bougeaient pas. Les jambes non plus. Je n’étais plus une personne : j’étais une caméra fixée sur son trépied. Un spectateur, sans pouvoir d’intervention.

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