Crépuscule de l'Histoire by Shlomo Sand

Crépuscule de l'Histoire by Shlomo Sand

Auteur:Shlomo Sand [Sand, Shlomo]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Essai, Littérature Israelienne
ISBN: 9782081417915
Google: 430yDwAAQBAJ
Éditeur: Flammarion
Publié: 2017-09-11T22:00:00+00:00


La « science » et le pouvoir magique des faits

Descartes, au XVIIe siècle, s’était refusé à considérer l’écriture de l’histoire comme une recherche scientifique. Au début du XVIIIe siècle, Vico a pourtant choisi d’intituler son ouvrage sur la philosophie de l’histoire La Science nouvelle. Il estimait, contrairement à Descartes, qu’il nous est plus facile de comprendre l’histoire humaine que de connaître notre cerveau ou la nature qui nous est extérieure, car l’histoire, c’est nous qui l’avons faite (c’est le principe du verum factum). Cette conception reposait sur le postulat selon lequel les hommes qui ont agi avant nous font intégralement partie de notre conscience ; aussi existe-t-il une identité entre eux et nous qui permet d’éclairer, de façon scientifique, la connaissance du passé. Le philosophe et historien napolitain était suffisamment prudent pour ne pas assimiler la dynamique qui anime la vie historique aux lois de la nature, qui relèvent de Dieu (Ranke, en revanche, était persuadé que si l’historien se souciait correctement des faits, la Providence divine veillerait à réguler les lois de l’histoire).

De Vico jusqu’au début du XIXe siècle, où le comte de Saint-Simon voulut faire des sciences la nouvelle religion de l’ère industrielle, nombre de penseurs du champ de la recherche sur l’homme et la société se sont mis à envier l’aura de la science expérimentale en pleine ascension. Les philosophes de l’époque des Lumières, séduits par le rationalisme scientifique, avaient déjà aspiré à l’introduire dans l’observation des développements de la société humaine. En outre, les avancées des sciences de la vie telles la biologie et la zoologie, suscitaient, de plus en plus, le désir de transposer le concept de science de l’univers du vivant vers celui de l’étude de l’homme, qui en fait partie. La scientificité (Wissenschaftlichkeit en allemand ; scientificity, en anglais) devint une espèce de mot de passe, garant de la vérité dans de nombreux canaux culturels de l’Occident, au moins jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle24. Cette mode « scientifique » a aussi contaminé plusieurs romanciers du XIXe siècle, sous la forme, entre autres, d’un style d’écriture réaliste et impersonnel. Chez Honoré de Balzac, Gustave Flaubert, Charles Dickens, Léon Tolstoï et Émile Zola, pour s’en tenir à quelques figures, la passion du réalisme, social et psychologique, exprimait la revendication de connaître précisément et systématiquement la vie dans sa totalité.

Du temps de Ranke, déjà, l’idée que l’on peut disséquer la société humaine, passée et présente, à l’aide d’outils scientifiques, avait fini par s’imposer parmi les élites intellectuelles, dans toute l’Europe, et dans ses prolongements sur le continent américain. Pas à pas, s’est ainsi constitué un socle pour la création de ce qui, de nos jours, est nommé, avec considération et révérence : « sciences humaines » et « sciences sociales ». Parmi l’élite des penseurs du siècle « scientifique », nombreux furent ceux qui entreprirent de rechercher d’une part, les lois qui régulent les rapports sociaux, et celles qui, d’autre part, règnent sur le temps humain. Trois exemples célèbres seront ici brièvement présentés pour



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