Ce que le mirage doit à l'oasis by Khadra Yasmina

Ce que le mirage doit à l'oasis by Khadra Yasmina

Auteur:Khadra, Yasmina [Khadra, Yasmina]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Flammarion
Publié: 2017-10-20T00:00:00+00:00


Toi qui as renoncé

Au soleil de tes jours

Et qui cries sur les toits

Que les dieux sont morts

D’ennui

Dis-toi que si la nuit

A déployé sa vallée

Dans le creux de ton âme

C’est parce que tu as tué

L’ange qui veillait

Sur tes rêves d’enfant

J’AI ÉTÉ CONTRAINT de quitter Kenadsa trois ans après ma naissance. Mon père ayant rejoint l’Armée de Libération (l’ALN), ma mère était constamment persécutée par les gendarmes français. Notre maison subissait perquisition sur perquisition, de jour comme de nuit.

Lors de l’une de ces intrusions musclées, ma mère, excédée,s’était jetée sur un soldat qui, en tentant de la repousser, m’avait défoncé le crâne d’un coup de crosse.

Le lendemain, le soldat était revenu pour se faire pardonner.Il m’avait offert un Mickey Mouse en caoutchouc, et mon oncle lui avait offert du thé.

Les perquisitions reprirent de plus belle. Les militaires espéraient surprendre mon père chez lui. Tourmentée puis torturée, ma mère demanda à quitter Kenadsa pour Oran où résidait sa fratrie. Nous avions pris l’avion, pour la première fois, en octobre 1957.

Mais il était écrit que partout où que j’aille, mon désert serait avec moi. Je le perdrais de vue qu’il enguirlanderait mes pensées.

À Oran, mes tantes maternelles me contaient le Sahara sans trêve et sans répit. Kenadsa habitait toutes les évocations. Ce petit village quasi millénaire, avec son ksar bâti par des architectes de génie huit siècles plus tôt et sa mosquée séculaire debout contre le ciel, le minaret érigé en phare afin que les brebis ne se perdent pas, avec sa confrérie, où reposent des manuscrits inestimables et un Coran du xiie siècle, qui engendra des érudits et des savants, se voulait citadelle et sanctuaire en même temps.

Mon Dieu ! Kenadsa, la Rose des sables, assise en tailleur à la croisée des destins.

Isabelle Eberhart, ce « Rimbaud au féminin » déguisé en homme, venait parfois se ressourcer à Kenadsa. Elle portait dans le bleu de ses yeux l’azur de sa Suisse natale et dans le cœur les espaces infinis des regs imprenables. Nos gens l’aimaient bien. Isabelle était une drôle de dame, téméraire et intrigante, aventurière et insoumise ; une poétesse reconvertie en journaliste, la plume alerte, l’âme militante, que la crue d’un oued à Aïn Sefra emporta au large de toutes les quêtes, en 1904, laissant son spahi de mari, Slimane, « orphelin » et veuf à la fois. Elle est morte dans la fleur de l’âge, au beau milieu de ses 27 ans, ivre de malaria et d’insolation.



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